SCHIFFRIN ANDRÉ (1935-2013)
Pleinement reconnu en France avec la parution de son essai L’Édition sans éditeurs, André Schiffrin, intellectuel vigilant, ne sépara jamais les exigences de son métier de sa passion pour la littérature et le monde des idées. Entre Paris et New York, c’est toute sa vie qui raconte une certaine histoire de l’édition.
André Schiffrin naît le 12 juin 1935, à Paris. Venu de Saint-Pétersbourg, son père, Jacques Schiffrin, s’est installé à Paris au début des années 1920. Il se lie avec André Gide et Roger Martin du Gard, et fonde en 1923 les éditions de la Pléiade, qui deviendront une collection intégrée aux éditions Gallimard à partir de 1933. Mais à l’automne de 1940, à la suite de l’instauration de la politique antisémite de l’Allemagne, relayée par le gouvernement de Vichy, Jacques Schiffrin est licencié par Gaston Gallimard. Il gagne avec sa famille les États-Unis, et s’installe à New York en 1941. Là, il va poursuivre son métier d’éditeur chez Pantheon Books – une maison d’édition fondée par Kurt Wolff, éditeur de Kafka – de 1943 à 1950. De son côté, diplômé de l’université Yale en 1957, André Schiffrin obtient deux ans plus tard une maîtrise au Clare College de Cambridge, où il est le premier Américain à diriger la revue littéraire anglaise Granta. De 1959 à 1963, il travaille comme éditeur chez New American Library à New York. Recruté comme responsable d’édition chez Pantheon Books en 1962, devenu directeur général de l’entreprise en 1969, André Schiffrin va publier, notamment dans le domaine des sciences humaines, des ouvrages novateurs signés par des auteurs très variés : il contribue ainsi à faire découvrir Eric Hobsbawm, Noam Chomsky, Edward Thompson, Studs Terkel et à faire traduire Günter Grass, Michel Foucault, Marguerite Duras, Michel Simon, Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir ou encore Pierre Bourdieu. Il publiera également Maus, d’Art Spiegelman. Mais en 1990, Random House, groupe propriétaire de Pantheon Books, met en avant les pertes financières enregistrées depuis de nombreuses années et contraint au départ André Schiffrin. Cette décision suscite la controverse et provoque de violentes protestations de la part de multiples auteurs et éditeurs, persuadés que le secteur de l’édition fait désormais prévaloir systématiquement la logique commerciale sur la qualité des ouvrages.
Deux ans plus tard, André Schiffrin fonde The New Press, maison d’édition indépendante à but non lucratif, soutenue initialement par des fondations. Il continue dès lors de privilégier les œuvres de fiction innovantes et les ouvrages sur les questions sociales et culturelles d’actualité. André Schiffrin évoque son expérience du monde de l’édition et de son évolution dans des essais qui ont fait date, tels que L’Édition sans éditeurs (1999), Le Contrôle de la parole (2005), et L’Argent et les mots (2010). On lui doit également une passionnante autobiographie,Allers-retours : Paris-New York, un itinéraire politique (2007). Il meurt le 1er décembre 2013, à Paris.
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- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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