PLATONOV ANDREÏ PLATONOVITCH KLIMENTOV dit (1899-1951)
Platonov est un des écrivains soviétiques les plus originaux. Fils d'ouvrier, ouvrier lui-même dès l'âge de treize ans, il est peut-être le meilleur exemple d'écrivain autodidacte parvenu au plus haut degré de la maîtrise littéraire. Rallié d'emblée à la révolution, il sert dans l'Armée rouge pendant la guerre civile ; il termine seulement en 1924 les études techniques qui font de lui un ingénieur spécialisé dans l'utilisation de l'électricité pour l'agriculture, d'abord dans la région de Voronej, puis, à partir de 1927, au ministère de l'Agriculture à Moscou. C'est à cette date qu'il se consacre véritablement à la composition de ses récits et nouvelles, bien qu'il ait commencé à écrire dès 1921. Avec ses recueils parus en 1927 et en 1928 : Les Écluses d'Épiphane (Epifanskie šljuzy), L'Homme caché (Sokrovennyj čelovek), il s'affirme d'emblée comme un écrivain de premier plan. Lié au groupe littéraire Passage et à la revue de Voronski Terre vierge rouge (Kransnaja Nov'), il s'attache à l'homme, à ses aspirations vitales les plus profondes. Prenant ses racines dans une sorte de spiritualisme populaire russe, pour lequel l'élan vital, les instincts, l'intuition définissent la personne humaine mieux que la raison et les cadres sociaux, Platonov oppose l'homme à la nature, et aussi à la ville, recherchant une nouvelle harmonie. Il est de ce fait parfois présenté comme un héritier de l'anarchisme des artisans russes. Auteur lyrique, il devient satirique lorsque la révolution lui semble trahir sa mission en se transformant en système bureaucratique. Cette nouvelle inspiration est illustrée par Makar touché par le doute (Usomnivšejsja Makar, 1929), La Fouille (Kotlovan, non édité en U.R.S.S.) et surtout Avec profit, chronique de paysans pauvres (Vprok, 1931). Il est alors en butte à l'hostilité des critiques : on l'accuse d'avoir calomnié le système soviétique dans Makar, en ne montrant qu'un appareil bureaucratique qui écrase la personne humaine. La nouvelle Vprok, traitée par Fadeïev de « chronique de koulak », et dans laquelle il abordait le sujet délicat de la collectivisation, lui vaut d'être interdit de publication. À partir de 1931, il n'apparaît plus dans la presse que comme critique littéraire, et son grand roman Tchevengour (Čevengur), écrit en 1929, restera longtemps inédit en U.R.S.S. Mobilisé en 1942, correspondant de guerre, il peut alors publier des récits patriotiques. Mais, en 1946, de nouvelles critiques le réduisent une fois de plus au silence. Néanmoins, Platonov continue pendant toute cette période à composer, sans aucun espoir d'être publié. C'est seulement à partir de 1965 que commence en Union soviétique la découverte de Platonov, en particulier grâce à l'édition de quelques pièces et à l'utilisation de certaines de ses œuvres pour l'adaptation cinématographique.
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Écrit par
- André RADIGUET : agrégé de l'Université, ancien élève de l'École normale supérieure de Saint-Cloud, maître assistant à l'université des langues et lettres de Grenoble
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