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LAGUNA ANDRÉS (1511-1559)

D'origine juive, convertis en 1492, les Laguna se sont intégrés dans la société chrétienne sans trop souffrir de la discrimination qui freinait la promotion sociale des « nouveaux chrétiens ». Le père, converso, meurt médecin apprécié du beau monde, deux frères font carrière dans le clergé, mais c'est à Andrés, le brillant médecin cosmopolite, que la famille doit prestige et prospérité.

De sa formation — humanités à Ségovie, sa ville natale, arts (philosophie) à Salamanque, études médicales à Paris jusqu'au grade de bachelier (1534) —, c'est l'étape parisienne (1529-1535) qui est déterminante, tant par l'exemple d'un Gonthier d'Andernach que par l'apprentissage du grec au Collège de France naissant.

Il entre dans la profession médicale en obtenant en 1540 un contrat de « médecin stipendié » de la ville de Metz, place occupée avant lui par Gonthier, après lui par Rabelais. Il n'abandonne pas cependant les travaux scientifico-littéraires.

Attiré par le service du frère de Charles Quint, Ferdinand, roi des Romains et roi de Hongrie, qui a fort à faire pour tenir tête aux Turcs et à la ligue de Smalkalde, Laguna traduit en latin un livret vénitien rapportant de pseudo-prodiges qui auraient ému Constantinople et annonceraient la fin de la puissance des Ottomans. Puis, en 1543, il déclame à l'université de Cologne la prosopopée de la malheureuse Europe maltraitée par elle-même ou par ses fils. Ce n'est pas une invective contre le belliqueux Français et son allié turc, mais une « lamentation de la paix » inspirée de celle d'Érasme, dont Laguna pille aussi les Adages. L'année suivante, Laguna sert le parti impérial autrement qu'en discours. Lors de la campagne de France, les chefs de l'intendance de Charles Quint, Francisco Duarte et Hugo Ángelo, distinguent le médecin espagnol de Metz et lui obtiennent un contrat pour une fourniture de vivres destinés aux villes conquises et à leurs garnisons.

À Rome, où il réside de 1545 à 1553, Laguna achète un diplôme de miles sancti Petri, titre d'honneur en même temps que de rente. En passant par Bologne, le bachelier parisien a su se faire octroyer un doctorat fort honorable, sans subir d'examen ni payer de droits (1545). Le cardinal D. Francisco de Mendoza y Bobadilla, dont il fut huit ans durant le médecin personnel, lui obtint de Jules III le titre honorifique de médecin de Sa Sainteté. Entraîné dans la disgrâce du cardinal, il gagne Florence, Venise, puis les Pays-Bas où il va imprimer son Dioscoride (1555). On est très mal renseigné sur les activités et les espérances de ses années d'Anvers et de Bruxelles (1555-1557). Le Dioscoride castillan dédié à Philippe II ne lui a pas valu la faveur du nouveau roi. L'épitaphe de Laguna pour le tombeau de famille préparait-elle, en 1557, une retraite à Ségovie ? Il meurt à Guadalajara.

Les services signalés de Laguna à la médecine tiennent surtout en deux forts in-folio. Son abrégé latin des œuvres complètes de Galien, véritable encyclopédie médicale, est imprimé à Venise (1548). Le succès en sera prompt et durable.

Dans sa traduction espagnole commentée du grand traité de Dioscoride, Acerca de la materia medicinal, il améliore le texte à l'aide d'un manuscrit prêté par Páez, autre humaniste au service de son cardinal. Il fait copier trait pour trait les dessins de plantes et d'animaux sur les illustrations de son devancier Mattioli, traducteur et commentateur italien de Dioscoride, dont il exploite aussi les commentaires, comme ceux d'Amatus Lusitanus. Les excursus personnels de Laguna plaisent encore par un langage savoureux, imagé, et par de narquoises historiettes que l'auteur présente comme choses vécues par lui. Déjà abondamment cité en 1611 dans le Tesoro de la lengua castellana de Covarrubias, Laguna[...]

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure, membre de l'Institut, administrateur honoraire du Collège de France

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