- 1. La Renaissance : vitalité, fantaisie et élégance (1530-1625)
- 2. Inigo Jones et sir Christopher Wren : l'affirmation d'un style national sous les Stuart (1603-1714)
- 3. Brièveté et originalité de la phase baroque
- 4. La suprématie palladienne (1710-1760)
- 5. Néo-classicisme et mouvement pittoresque : le syncrétisme comme langage (1750-1820)
- 6. Renaissance hellénique et néo-gothique : les « revivals » victoriens
- 7. Bibliographie
ANGLAIS (ART ET CULTURE) Architecture
Brièveté et originalité de la phase baroque
Le baroque anglais est un sujet controversé dans la mesure où il se différencie radicalement de ses équivalents continentaux. Il est aussi éloigné des recherches plastiques des architectes italiens que des sinuosités de l'Allemagne méridionale. Protestant dans la mesure où il reste empreint d'une certaine gravité, il se fonde essentiellement sur une espèce de théâtralisation du corps même de l'architecture où joue pleinement l'affirmation des volumes. Austère et massif, nourri de références gothiques et élisabéthaines, son « cubisme » apparaît parfois curieusement moderne. Ainsi, Emil Kaufmann voit dans ce bref épanouissement du début du xviiie siècle une volonté de réforme « anti-baroque » et fait de Vanbrugh et d'Hawksmoor les véritables précurseurs de l'architecture révolutionnaire. Sir John Vanbrugh (1664-1726), allié à la noblesse et à la grande bourgeoisie, auteur dramatique brillant, ne s'adonna que tardivement à l'architecture. Il construisit uniquement de vastes demeures patriciennes. Goose Pie House (1699, détruite) montre déjà un traitement vigoureux des masses ainsi qu'une dissonance affirmée entre les différentes parties. Si pour Castle Howard (1701-1715) il reprend le schéma très articulé de la villa palladienne avec ses vastes ailes, c'est à Bleinheim Palace (1706-1726) qu'il déploie cette « imagination bizarre » qui étonna parfois ses contemporains. Pour ce palais colossal, élevé par la reine Anne et la nation anglaise à la gloire du duc de Marlborough, il crée une sorte de tension dramatique en jouant sur une interpénétration des volumes qui exprime d'ailleurs la complexité du plan, tout en conférant une allure presque fantastique au bâtiment par l'adjonction d'étranges superstructures. À Seaton Deleval, il réalisa un « manifeste » de sa manière syncrétique, transgressant magnifiquement l'emploi des ordres.
Nicholas Hawksmoor (1661-1736), qui fut le principal collaborateur des dernières années de Wren, se trouva associé à Vanbrugh, tant à Castle Howard qu'à Bleinheim, et l'on démêle mal d'ailleurs leur rôle respectif. À la suite de la loi de 1711 (Act for Building Fifty New Churches) où s'affirme la volonté tory de ne pas laisser sans direction spirituelle les quartiers populaires de Londres, Hawksmoor fut chargé de la construction de six églises. St. Alphege à Greenwich, St. Ann à Limehouse et Christ Church à Spitafields répondent à une volonté de traduire des effets médiévaux uniquement au moyen d'éléments du vocabulaire classique et parviennent ainsi à un « gothicisme baroque ». À St. Mary à Woolnoth ou encore à St. George à Bloomsbury, il pousse plus loin la recherche « d'effets excentriques », procédant par juxtaposition ou superposition de volumes simples sans transition, selon la technique du « collage » architectural. Sa dernière œuvre, le mausolée de la famille Carlisle à Castle Howard révèle des aspirations nettement plus antiquisantes.
Toujours dans le cadre de la loi de 1711, il faut évoquer la personnalité originale de James Gibbs (1682-1754), Écossais et catholique, qui construisit St. Mary the Strand dont le portique circulaire rappelle que l'architecte avait suivi à Rome les leçons de Carlo Fontana. L'élégante silhouette de St. Martin in the Fields qui domine Trafalgar Square présente la combinaison si typiquement anglaise du porche classique dominé par un clocher unique. C'est à Oxford que se trouve son œuvre la plus aboutie, la Radcliffe Camera (1737-1749), bibliothèque élevée sur plan circulaire, dont le puissant parti monumental dérive des meilleurs modèles romains.
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Écrit par
- Monique MOSSER : ingénieur au C.N.R.S., enseignante à l'École nationale supérieure d'architecture de Versailles
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Médias