FREUD ANNA (1895-1982)
« Orthodoxie » freudienne et ego psychology
Parallèlement à son activité d'analyste, Anna Freud s'est occupée de la publication des œuvres inédites de son père, notamment de ses lettres, ce qui, ajouté à son statut d'enfant préféré, contribua à faire d'elle, aux yeux des analystes, le garant de l'orthodoxie freudienne. Mais il semble qu'elle ait mis à profit cet avantage pour influer sur la doctrine : d'une part, en essayant de la rendre accessible aux non-analystes, notamment les parents et les pédagogues (telle sera la visée de certains de ses ouvrages, comme L'Initiation à la psychanalyse pour éducateurs, où elle abandonne le jargon sophistiqué et utilise des notions simples) ; d'autre part, en accentuant le rôle de l' ego dans la personnalité et en infléchissant les théories de son père dans le sens d'une psychologie du moi. Dans son ouvrage célèbre, Le Moi et les mécanismes de défense, elle explique que « le traitement analytique a de tout temps eu pour objet le moi et ses troubles, l'étude du ça et de ses modes d'action ne constituant qu'un moyen d'atteindre le but thérapeutique. Ce but reste invariablement le même : supprimer les troubles et rétablir l'intégrité du moi ». Or si l'on définit la psychanalyse comme un moyen de rétablir l'intégrité du moi plutôt que comme une voie d'approche des désirs inconscients, et si l'on définit le moi lui-même comme l'instance qui permet au sujet de « s'adapter à la réalité », on semble se contenter de vouloir remanier superficiellement et artificiellement la « personnalité » du sujet pour lui permettre de jouer, pendant au moins un certain temps, le rôle que la société attend de lui.
Anna Freud est restée jusqu'à sa mort le défenseur farouche de ce qu'elle jugeait être la vraie doctrine freudienne. Mais la lecture qu'elle en faisait et l'autorité qu'elle garda sur l'I.P.A. suscitèrent souvent des débats et des conflits passionnés au sein de la communauté psychanalytique internationale, comme en 1953, au Congrès de Rome, qui fut illustré par le discours et la dissidence de Jacques Lacan.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Pamela TYTELL : Ph.D. de Columbia University, New York, docteur ès lettres, maître de conférences à l'université de Lille-III
Classification
Média
Autres références
-
DÉFENSE MÉCANISMES DE
- Écrit par Pierre-Paul LACAS
- 663 mots
- 1 média
Expression usitée en psychanalyse pour désigner plusieurs types d'opérations psychiques destinées à « protéger » le moi. La notion de défense est présente chez Freud dès le début de ses recherches ; ainsi, dans ses Études sur l'hystérie (1895) : « Une condition indispensable...
-
DÉFENSE, psychanalyse
- Écrit par Odile BOMBARDE
- 1 296 mots
...: introjection, projection, clivage, déni, idéalisation, réparation, identification projective. Dans Le Moi et les mécanismes de défense (1936), Anna Freud se livre, quant à elle, à une description variée et concrète des comportements défensifs, qui, s'ils procèdent tous du moi et ont pour objet... -
INCONSCIENT
- Écrit par Christian DEROUESNE , Hélène OPPENHEIM-GLUCKMAN et François ROUSTANG
- 8 283 mots
- 2 médias
Ignorant cette logique de l'inconscient qui se déduit des processus de condensation et de déplacement, des psychanalystes, en particulier Anna Freud dans Le Moi et les mécanismes de défense, tendent à pervertir la découverte freudienne par le simple fait qu'ils nomment ces processus des ... -
KLEIN MELANIE (1882-1960)
- Écrit par Jean-Bertrand PONTALIS
- 2 226 mots
- 1 média
...décisive, fut pour Melanie Klein celle de l'enfant. Elle sut y trouver le point d'appui d'un long et courageux affrontement avec la propre fille du Maître, Anna Freud. Celle-ci estimait que la psychanalyse était devenue assez assurée de ses fondements théoriques et techniques pour chercher à s'appliquer aux... - Afficher les 7 références