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CAYLUS ANNE CLAUDE PHILIPPE comte de (1692-1765)

« Le protecteur des arts et le fléau des artistes » : c'est en ces termes sévères que Grimm définit la personnalité du comte de Caylus. Plus indulgente, la postérité a retenu surtout l'image du grand collectionneur d'antiques et de l'ardent propagandiste du retour à un goût sévère.

Né dans une famille de noblesse de cour, le comte de Caylus commença par se consacrer quelques années au métier des armes. Il y prit le goût des voyages et, ayant abandonné la carrière militaire en 1716, en entreprit même de fort lointains puisqu'il alla en 1716-1717 jusqu'en Asie Mineure. Il est donc l'un des premiers amateurs à avoir connu les vestiges de l'Antiquité grecque. Menant à Paris la vie oisive du grand gentilhomme qu'il était, il se lia avec Crozat, avec Mariette et tout un milieu d'artistes et de connaisseurs. Lui-même gravait et fut en 1731 reçu à l'Académie de peinture et de sculpture comme membre honoraire amateur, avant d'entrer en 1742 à l'Académie des inscriptions.

Collectionneur passionné, il se distingue, dans cette première moitié du xviiie siècle, par les objets dont il compose son cabinet : antiquités grecques, romaines, mais aussi étrusques et égyptiennes. Par là, son goût est en avance sur celui de ses contemporains, et l'on est fondé à voir en lui l'un des pères du mouvement néo-classique. Il consacra plusieurs années vers la fin de sa vie à publier les sept volumes de son Recueil d'antiquités (1752-1757), qui exerça une considérable influence sur les artistes de l'époque de Louis XVI et de l'Empire.

On lui doit par ailleurs des romans et des facéties. On lit encore une Histoire de Guillaume, cocher, « œuvre poissarde » selon H. Coulet, où l'auteur fait entendre la langue des petites gens, à Paris, au milieu du siècle. Il utilise les manuscrits de la Bibliothèque du roi pour en tirer des Contes orientaux (1743). Ses Œuvres badines occupent douze volumes, réimprimés par Garnier en 1787. Ses goûts le portaient plutôt vers de tels genres que vers la littérature philosophique. Avant de mourir, environné de savants et d'artistes, Caylus lègue ses collections au Cabinet du roi.

Le caractère brusque et les manières tranchantes de Caylus lui valurent nombre d'ennemis : Grimm, on l'a vu, Diderot, Marmontel. On l'accusa de charlatanerie, et il est certain que ses ouvrages renferment bien des inexactitudes. C'est pourtant une des figures les plus originales du siècle de Louis XV qui disparaît en 1765 avec Caylus et l'une de celles qui ont eu un rôle dans l'histoire des arts.

— Georges BRUNEL

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure, agrégé de lettres, conservateur des objets d'art des églises de la Ville de Paris

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