- 1. Un corpus patrimonial en expansion
- 2. Un monopole historien remis en cause
- 3. Vers une anthropologie du patrimoine
- 4. Le patrimoine comme objet anthropologique. Échelles et incarnations de la patrimonialisation
- 5. Le patrimoine comme savoir. Légitimités, expertises et conflits
- 6. Le patrimoine comme image de soi. Culture, altérité et performance
- 7. Le patrimoine, une fabrique de l’humain
- 8. Bibliographie
ANTHROPOLOGIE DU PATRIMOINE
Le rapport que les sociétés européennes et nord-américaines ont entretenu avec les monuments et le souvenir du passé s’est fondé sur la mise en relation d’un héritage pensé comme collectif et des groupes nationaux identifiés et légitimés. Ce cadre a promu des modèles de sélection, de gestion, de sauvegarde et de transmission de ce que l’on entend aujourd’hui par patrimoine, qui se sont diffusés dans toutes les sociétés contemporaines. Musées, bibliothèques, archives, conservatoires, parcs naturels, listes de biens d’exception, appellations d’origine comptent parmi ces dispositifs d’entretien et de conservation des choses du passé. Le terme « patrimoine » fait ainsi référence à un corpus d’objets, d’espaces et d’édifices sélectionnés afin d’incarner les symboles d’une appartenance collective présente, notamment la nation. Il tend cependant à étendre son empire bien en dehors de ses limites premières et l’anthropologie permet de saisir les enjeux que pose le patrimoine aux sociétés contemporaines.
Un corpus patrimonial en expansion
À partir des richesses archéologiques, artistiques et naturelles que les pouvoirs politiques héritiers des Lumières avait protégées à partir du xviiie siècle, la fin du xxe siècle et le début du xxie siècle ont considérablement étendu la typologie des biens que l’on entend mettre hors de danger de disparition. Elles ont également diffusé une idéologie patrimoniale de conservation et de sauvegarde qui dépasse le cadre strictement occidental et régalien. Les savoirs érudits et les savoir-faire artisanaux, les stocks génétiques végétaux, les performances rituelles, musicales ou culinaires sont maintenant dignes d’être préservés, et les groupes ethniques en diaspora, les ensembles régionaux transfrontaliers ou des associations de citoyens sont devenus des acteurs du patrimoine. En prenant l’UNESCO comme référence, le champ patrimonial est ainsi passé des vestiges remarquables du passé national (convention sur le patrimoine mondial de 1972) à un ensemble de savoirs et de pratiques culturelles (convention de 2003 sur le patrimoine culturel immatériel) démontrant à la fois leur spécificité locale et leur commune humanité. Ces changements s’expriment aujourd’hui à travers des institutions intergouvernementales ou des conventions régionales, comme celle de Faro de 2005 émanant de la Commission européenne. Ces cadres légaux internationaux promeuvent aujourd’hui des activités de conservation de la culture humaine se rapprochant de l’acception anthropologique du concept de culture, constituée non seulement de réalisations matérielles, de sites et de paysages, mais également de performances, de croyances et de savoirs.
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Écrit par
- Cyril ISNART : chargé de recherche au CNRS
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Médias
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