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ANTIOCHE

L'école d'Antioche

Antioche devint rapidement un centre intellectuel et théologique important, aux caractéristiques bien marquées. Après l'apologiste saint Théophile, le premier théologien antiochien que nous connaissions est Paul de Samosate (évêque à partir de 260 env.). Dans l'état actuel de nos sources, il est difficile de reconstituer avec certitude l'enseignement de ce personnage, au demeurant assez étrange. Il semble avoir considéré le Christ comme un homme, adopté par Dieu ; il représenterait déjà la tendance rationaliste qu'on reprochera à la tradition antiochienne. Vigoureusement contré par le prêtre Malchion, « un sophiste savant, chef de l'enseignement de la rhétorique dans les écoles helléniques » (Eusèbe, Hist. eccl., VII, xxix), il fut condamné et déposé par deux synodes successifs (264-265, 268-269).

Au début du ive siècle, saint Lucien, prêtre martyrisé sous Dioclétien (312), est un savant exégète, auteur d'une recension de la Bible grecque (Septante) et du Nouveau Testament : il pose par là les bases de la critique biblique, qui sera une caractéristique de l'exégèse antiochienne. D'autre part, les premiers ariens se réclameront de lui, sa théologie semble en effet avoir été subordinatienne : le Verbe (Λ́ογος) est inférieur au Père.

Mais c'est la fin du ive siècle et la première moitié du ve siècle qui verront la période la plus brillante de l'« école d'Antioche ». Entendons par là non pas une institution universitaire, ni même une école catéchétique analogue à celle d'Alexandrie, mais une tradition intellectuelle et spirituelle, un esprit et une méthode, qui vont marquer une génération d'exégètes et de théologiens. Tout au plus peut-on retenir que Diodore rassemble autour de lui, dans un monastère qui est en même temps un centre d'études (askètèrion), des disciples, dont quelques-uns furent très grands : Théodore de Mopsueste, saint Jean Chrysostome et peut-être aussi Théodoret.

Exégèse

L'école d'Antioche est d'abord une école d'exégèse. Diodore, qui devait être évêque de Tarse († av. 394), commente l'Ancien Testament, les Évangiles, les Actes des Apôtres, l'Épître aux Romains et la Ire Épître de saint Jean. Jean Chrysostome, diacre puis prêtre d'Antioche avant d'être évêque de Constantinople en 397 († 407), n'est pas un spécialiste de l'exégèse savante, mais sa prédication, à Antioche comme à Constantinople, est avant tout un commentaire de l'Écriture (les Psaumes, Isaïe, Matthieu, Luc, Jean, les Actes, et surtout saint Paul, dont il est peut-être le meilleur interprète). Jean est un pasteur et un moraliste, mais ses homélies familières révèlent un exégète pénétrant, sans aucune tendance à l'allégorisme. De Théodore, évêque de Mopsueste en Cilicie († 428), on a conservé, intégralement ou par fragments, des commentaires sur les Psaumes, saint Jean, saint Paul. Exégète savant, il est pour l'Orient syrien l'Interprète par excellence (Mefasquānā). Enfin Théodoret, évêque de Cyr († env. 466), théologien, apologiste, historien, commente les Psaumes, le Cantique des cantiques, les Prophètes, saint Paul.

Tous prennent vigoureusement parti contre l'allégorie, dont Origène est le représentant le plus célèbre. Entendons par ce mot, malgré les imprécisions d'un vocabulaire assez fluent, le procédé littéraire qui dans les faits racontés par l'histoire ne veut voir qu'une parabole à travers laquelle il faut découvrir un sens spirituel caché. Ainsi déjà Eustathe reproche à Origène ses subtiles interprétations des noms des personnages bibliques : par là, Origène détruit la réalité des récits ; il a tout bouleversé par ses interprétations allégoriques (Sur la pythonisse, 22).[...]

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