ANTIPATROS ou ANTIPATER (400-319 av. J.-C.)
Type du « vieux serviteur fidèle », Antipatros fut sans doute celui sans qui la Macédoine n'aurait jamais accédé au rang de grande puissance, puis d'empire.
Né vers 400 avant J.-C., il fut en effet l'alter ego de Philippe II qui appréciait en lui peut-être moins le chef militaire que l'homme d'État. Ami d'Aristote, auteur d'une histoire, perdue, des guerres d'Illyrie et d'une vaste correspondance, Antipatros tranche par son sérieux et son savoir sur le reste de l'entourage royal. On peut dire qu'il fut un philosophe en action, dans la mesure où sa politique à l'égard des Grecs dénote l'influence des théoriciens de l'Académie et du Lycée.
On ne sait presque rien de son activité durant cette première période de sa vie. Sa participation aux négociations de paix avec les Athéniens (346 av. J.-C.) et sa désignation à la tête de l'ambassade chargée de leur remettre, après Chéronée (338 av. J.-C.), les cendres de leurs morts ne laissent toutefois aucun doute sur le rôle de premier plan qu'il jouait désormais, d'autant qu'il avait consolidé sa position en mariant l'une de ses filles à l'héritier de la maison princière de Lyncestide, en haute Macédoine. Tuteur du jeune Alexandre, il était chargé de toutes les responsabilités quand Philippe était indisponible. L'assassinat de celui-ci (336 av. J.-C.), tombant opportunément pendant que ses rivaux potentiels se trouvaient en Asie Mineure, lui permit de porter sur le trône le prince qu'il avait formé.
On connaît mieux la suite de sa carrière. Alexandre lui confie la régence durant ses absences, en 335 av. J.-C., puis en 334, lorsqu'il s'embarque pour l'Asie. « Stratège d'Europe », Antipatros possède les prérogatives d'un souverain et parvient, avec des moyens diminués par les renforts expédiés en Asie, à réduire des révoltes en Thrace (331 av. J.-C.) et en Grèce où le Spartiate Agis III, allié des Perses, rassemble les cités hostiles à la Macédoine avant d'être vaincu à Mégalépolis. Pour assurer sa mainmise sur la Grèce, Antipatros est toutefois contraint de s'appuyer sur des régimes impopulaires, oligarchies ou tyrannies. On a souvent souligné que, sans cette dure vigilance exercée sur la Grèce d'Europe, Alexandre n'aurait pas eu les mains libres pour réaliser ses conquêtes asiatiques.
Revenu de l'Inde en 324 avant J.-C., Alexandre se croit assez fort pour adopter une politique libérale, ce qui impliquait un changement de personnes : le plus prestigieux de ses jeunes généraux, Cratèros, aurait donc remplacé Antipatros, appelé auprès du roi à Babylone, sans que l'on sache si le vieux stratège, demeuré loyal quand le trésorier d'Alexandre, Harpale, avait tenté d'entraîner Athènes et la Grèce dans une révolte armée (324 av. J.-C.), aurait laissé démolir l'édifice patiemment construit. Celui-ci se lézarde dès la mort du roi (323 av. J.-C.).
Maintenu dans ses fonctions lors du « partage de Babylone » (été 323 av. J.-C.), Antipatros voit en effet, à l'appel des Athéniens et des Étoliens, de nombreuses cités prendre les armes contre la domination macédonienne. Assiégé dans Lamia par Léosthène (d'où le nom de guerre lamiaque), Antipatros ne fut sauvé que par l'écrasante victoire navale de Cleitos à Amorgos, où la flotte athénienne fut définitivement anéantie, et l'arrivée de renforts amenés d'Asie par Léonnatos puis par Cratèros, auquel il fit épouser Phila, l'aînée de ses trois filles.
Après la défaite des coalisés à Crannon (322 av. J.-C.), Antipatros, sûr de la fidélité de Cratèros, tenait fermement la Macédoine et la Grèce, dont les cités avaient perdu les moyens d'une politique indépendante. Il tenta, en lui offrant la main d'une autre de ses filles, Nikaia,[...]
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Écrit par
- Paul GOUKOWSKY : correspondant de l'Institut (Académie des inscriptions et belles-lettres), professeur de langue et littérature grecques à l'université de Nancy-II
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