BLONDIN ANTOINE (1922-1991)
Né à Paris en 1922, Antoine Blondin vécut un S.T.O. sinistre, une Libération dont il ne perçut que l'envers, un après-guerre qui n'était pas de sa couleur préférée. Il cultive l'amitié des jeunes écrivains d'alors (Roger Nimier, Michel Déon, Jacques Laurent), qu'on allait nommer « les hussards ». Les romans de Blondin se recommandent par des titres merveilleux, qui évoquent discrètement Paul Morand et Marcel Aymé : L'Europe buissonnière (1949), Les Enfants du bon Dieu (1952), L'humeur vagabonde (1955). Après avoir tout promis, le roman de Blondin se défait et se délite, non sans des grâces fitzgéraldiennes. Un singe en hiver (1959) échappe à cette fatalité : l'affrontement entre Albert Quentin, celui qui a cessé de boire, et Gabriel Fouquet, celui qui ne cesse de boire et de faire boire, constitue la fable la plus concise de la tentation alcoolique. Dans les années 1970, Blondin se détourne du roman : Monsieur Jadis, ou 1'École du soir (1970) innove dans le sens de ce que certains théoriciens appelleront plus tard l'autofiction. On ne se défend pas généralement de l'idée que ce surdoué de l'écrit n'a pas donné sa mesure, et que, tel Fitzgerald, il nous contraint à rêver aux œuvres qu'il n'a pas écrites. Cependant, on découvre que Blondin a atteint la perfection et la jubilation dans l'écriture journalistique du sport. Blondin a du premier coup surpassé Hemingway et Morand, mais aussi de valeureux spécialistes, quand il s'est agi d'évoquer le Tour de France, le tournoi des Cinq Nations, les jeux Olympiques. Grâce à lui, à partir de 1954, le quotidien sportif L'Équipe devint un temps la fête permanente du mot d'esprit et de l'invention langagière. L'Ironie du sport (1988) rassemble le tiers de ses chroniques sportives. Blondin, le barde ému du sport, fut bien le poète épique d'une période désertée par l'épopée.
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Écrit par
- Jacques LECARME : professeur de littérature française à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle
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