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HAMILTON ANTOINE (1646-1720)

Auteur (en français) d'un roman historico-biographique où il prend pour personnage son propre beau-frère, le comte de Gramont. Le titre complet de ce roman, publié en 1713, est le suivant : Mémoires de la vie du comte de Gramont, contenant particulièrement l'histoire amoureuse de la cour d'Angleterre sous le règne de Charles II (1713).

À vrai dire, c'est la vie même d'Antoine Hamilton qui est un véritable roman d'aventures, dans la mesure où elle suit de près toutes les vicissitudes de l'histoire anglaise, au cours du xviie siècle. Il est né en Irlande en 1645 (de père écossais), et donc catholique. Après la mort de Charles Ier, pour se soustraire aux vengeances exercées contre les royalistes fidèles, la famille vient s'établir en France, près de Caen (1650). En 1660, la restauration de Charles II permet le retour en Angleterre. Toutefois, ce roi ne pouvant braver ouvertement les préventions des Anglais, Hamilton, en sa qualité de catholique, est exclu des emplois et honneurs politiques.

En 1662, le chevalier Philibert de Gramont, exilé de France à la cour d'Angleterre, s'éprend de la belle Elizabeth Hamilton, sœur de l'auteur, et l'épouse. Lorsque le couple rentre en France, Antoine Hamilton y fait de fréquents voyages : il est si bien naturalisé à la cour de France qu'à l'occasion de l'un de ses passages il est choisi par Louis XIV pour figurer parmi les acteurs d'un ballet de Quinault, Le Triomphe de l'amour.

 En 1685, lorsque lorsque Jacques II succède à Charles II, l'armée anglaise s'ouvre de nouveau aux catholiques, et Hamilton prend du service en Irlande. Lorsque la cause de Jacques II est compromise, il repasse en France avec son frère Richard, l'un et l'autre devenant familiers de la cour du roi en exil à Saint-Germain-en-Laye. Cette cour est des plus tristes, à cause de l'austère dévotion du roi détrôné et de son entourage. Aussi ne convient-elle guère à l'humeur d'Antoine Hamilton. Il cherche des compensations auprès de la joyeuse petite cour de Sceaux, que préside la duchesse du Maine ; il écrit des poésies légères et des contes, et surtout les Mémoires du comte de Gramont, avant même la mort de ce dernier (1707).

Ces mémoires conduisent le héros de 1643 à 1663, juste avant qu'il épouse à Londres la sœur de son biographe. Ce héros est présenté comme un aristocrate sceptique et libertin ; Voltaire dit de lui qu'il « n'a guère d'autre rôle que celui de friponner ses amis au jeu, d'être volé par son valet de chambre et de dire quelques prétendus bons mots sur les aventures des autres ». Le plus remarquable dans ce livre est sans doute le ton de l'auteur, dont le pessimisme transparaît sous l'ironie et la désinvolture. H. Coulet, dans son étude sur Le Roman jusqu'à la Révolution loue chez lui « un style admirable de vivacité et d'ironie, qui rappelle Bussy-Rabutin, et qui annonce Voltaire ». Dans un long jugement élogieux sur les Mémoires, Laharpe proposait un autre rapprochement : « Il y a quelque chose du ton de Voiture, mais infiniment perfectionné. L'art de raconter les petites choses, de manière à les faire valoir beaucoup, y est dans sa perfection. » Pendant un siècle et demi, de très nombreuses réimpressions attestent le succès du livre, tant en France qu'en Angleterre.

— Denise BRAHIMI

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Écrit par

  • : ancienne élève de l'École normale supérieure de Sèvres, professeure agrégée des Universités (littérature comparée), université de Paris-VII-Denis-Diderot

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