WATTEAU ANTOINE (1684-1721)
Formation, influences
La biographie de Watteau, par-delà toutes ses inconnues et incertitudes, fait apparaître certains traits constants de son caractère, ainsi que la fréquentation de personnalités diverses qui expliquent son approche de la peinture, son évolution, les sujets retenus, en constituant un milieu homogène où éclôt cet art singulier. L'insistance est mise avant tout sur l'amour du dessin. Que ce soit à Valenciennes dans sa première jeunesse ou à Paris avant de connaître Gillot, puis en compagnie de celui-ci, Watteau ne cesse de crayonner tout ce qu'il voit : spectacles de la rue, silhouettes, personnages populaires, comédiens, voire paysages, tout lui est prétexte à accumuler sans cesse les croquis, à assembler sur une même feuille divers personnages. Il compose également à la sanguine des motifs d'arabesques, pour Audran et sans doute, auparavant, pour Gillot. S'il copie Rubens au Luxembourg, si sa fascination pour le coloris chaud et la vivacité du pinceau du Flamand est attestée, il ne faut pas pour autant oublier que Watteau est un homme du Nord, qu'il a vu dans sa prime jeunesse des peintures flamandes à Valenciennes et que sa palette aussi bien que certains de ses motifs s'en ressentiront toujours. Mais il s'inspire également de peintures de l'Albane, de Louis de Boullogne ou de Charles de La Fosse. Et lorsqu'il loge chez Crozat, ce sont les dessins des Vénitiens qui le fascinent ; il copie Titien, Campagnola, Giorgione, le Bassan... À Gillot il doit, en partie, sa passion pour le théâtre et pour les acteurs, isolés ou groupés comme dans Arlequin empereur dans la lune (musée des Beaux-Arts, Nantes) ou, plus tard, dans Les Jaloux, La Partie quarrée (Museums of Art, San Francisco), L'Amour au Théâtre-Français et L'Amour au Théâtre-Italien (Staatliche Museen, Berlin Dahlem). Et bien après avoir quitté Audran, il continue à inventer et à peindre des arabesques pour des dessus de porte, des paravents, des panneaux de boiserie, mais aussi des écrans, des couvercles de clavecin. De même est-ce sans doute à une commande de Sirois qu'il doit d'avoir peint ses premiers sujets militaires, qui constitueront une part importante de sa production peinte et dessinée, pour laquelle on doit sans doute également prendre en compte le voyage à Valenciennes de 1709-1710, qui lui fait parcourir les routes encombrées d'une soldatesque minable. Chez Crozat, il est amené à peindre des sujets mythologiques, ces Saisons de format ovale pour la salle à manger – seule subsiste L'Été, à la National Gallery de Washington –, dont le modèle vient peut-être de Charles de La Fosse, mais pour lesquelles Watteau multiplie les dessins préparatoires. Par l'intermédiaire de Crozat, sans doute, il rencontre, vers 1715, l'ornemaniste-architecte Gilles Marie Oppenord, dont il possède des dessins de fontaines, et c'est chez lui qu'il connaîtra la pastelliste vénitienne Rosalba Carriera lors de son séjour à Paris en 1720. C'est encore dans l'hôtel du mécène qu'il rencontre le comte de Caylus et Nicolas Hénin, avec qui il dessine. Hénin sera l'un des quatre légataires de ses dessins, après l'abbé Haranger, avec Gersaint et le teinturier Jean de Jullienne (1686-1766), ami de Watteau dont il possédera un moment l'essentiel de la production peinte, qu'il fera graver, ainsi que quelque trois cent cinquante de ses dessins.
S'étonnera-t-on dès lors de voir apparaître parmi les biographes de Watteau les noms de Jullienne, de Gersaint, de Caylus, auxquels on ajoutera celui d'Antoine La Roque, rédacteur du Mercure de France, dont Watteau a fait un portrait historié et qui possède de nombreux dessins et des peintures de l'artiste ?
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Écrit par
- Marianne ROLAND MICHEL : docteure en histoire de l'art, directrice de la galerie Cailleux, Paris
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Médias
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