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BRUCKNER ANTON (1824-1896)

Les symphonies

À partir du début des années 1870 et quasiment jusqu’à la fin de sa vie, c’est sa production symphonique qui sera au cœur de ses préoccupations, alternant avec de nombreuses compositions religieuses, majoritairement des motets pour ensembles vocaux, a cappella, avec orgue ou ensemble instrumental, généralement de petite dimension, mais dont se détache le magistral Te Deum (1884), qui reste son œuvre sacrée la plus célèbre.

Les symphonies de Bruckner lui ont coûté de la peine et ont connu, de son vivant comme par la suite, des fortunes diverses. La Symphonie no 2 (1871-1872), créée en 1873 sous la direction de l’auteur, fut bien accueillie. Ce ne fut pas le cas de la no 3 (1873-1876), dédiée à Wagner, qui connut un échec total et passa par plusieurs remaniements. La Symphonie no 4 dite Romantique, la seule à comporter un sous-titre, fut entreprise en 1874, mais menée à bien entre 1878 et 1880. Elle remporta un beau succès lors de sa création en 1881 sous la direction de Hans Richter, et reste aujourd’hui une des plus populaires en raison de sa tonalité lumineuse. Une étape est franchie avec l’imposante Symphonie no 5, cathédrale sonore grandiose autant qu’austère, d’une durée d’environ 80 minutes. Composée entre 1875 et 1880, elle fut gardée sous le boisseau jusqu’en 1894, année où elle fut jouée en l’absence du compositeur dans une version tronquée. Achevée dans des circonstances heureuses, bénéficiant du succès récent de la Symphonie no 4, la Symphonie no 6, écrite en 1879-1881, semble pourtant souffrir du voisinage de la no 5, bien qu’étant d’une écoute plus aisée. C’est avec la Symphonie no 7 (1881-1883), dédiée au roi Louis II de Bavière, créée par Arthur Nikisch à Leipzig en 1884, que Bruckner remporta le plus grand triomphe de sa vie et accéda enfin à une renommée durable.

La plus monumentale de toutes ses symphonies, la 8e, fruit de trois ans de travail (1884-1887), celle dont la composition fut la plus difficile, faillit le pousser au désespoir à cause du refus du chef d’orchestre Hermann Levi de la diriger. Une remise sur le métier aboutit à une version comportant des différences notables, et fut achevée en 1890 et créée en 1892 par Hans Richter. Mais la version originale subsiste, les deux ayant été publiées. Parfois mise en parallèle avec la Symphonie no 5 de Beethoven en raison de la similitude de tonalité (ut mineur), la 8e de Bruckner fait intervenir tout à la fois l’homme dans sa relation avec Dieu, le paysan fusionnel avec son terroir (le scherzo, placé en seconde position, portait originalement la mention « Micherl rêve de revenir au pays »), tandis que le finale avec son colossal brassage thématique ferait référence à l’histoire, à savoir l’entente des trois empereurs d’Autriche, d’Allemagne et de Russie (1881).

En 1891, Bruckner reçut le titre de docteur honoris causa de l’université de Vienne, compensation de longues années de doute et de labeur.

Sa dernière symphonie, la 9e, ébauchée dès 1887, reprise quatre ans plus tard après l’achèvement de la précédente, resta inachevée et limitée à trois mouvements ; quelques fragments du finale ont été conservés. Comme la neuvième symphonie de Beethoven, elle est en ré mineur. C’est son scherzo central qui marque le point culminant non seulement de l’œuvre elle-même mais peut-être de toute la production de Bruckner, qui n’a encore jamais atteint une telle intensité de violence tellurique ; l’adagio, ensuite, est un serein adieu à la vie de l’un des plus grands mystiques de la musique.

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Écrit par

  • : docteur en musicologie, maître de conférences à l'université d'Évry, retraité

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Anton Bruckner - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Anton Bruckner

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