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TÀPIES ANTONI (1923-2012)

Peintre de la matière dense et lacérée dans laquelle viennent s'inscrire signes et mots, empreintes et objets, le catalan Antoni Tàpies écrit à propos du tableau : « Celui-ci n'est qu'un support... Le talisman qui dresse ou écroule des murs dans les recoins les plus reculés de notre esprit, qui ouvre et parfois ferme les portes et les fenêtres des édifices de notre impuissance, de notre servitude ou de notre liberté. »

Dans le milieu intellectuel catalan

Antoni Tàpies est né en 1923 à Barcelone, dans un milieu cultivé, particulièrement concerné par le fait catalan. Lui-même dira plus tard : « Si je peins comme je peins, c'est d'abord parce que je suis catalan. » Adolescent à la santé fragile, il commence à peindre et à dessiner très jeune, en copiant Van Gogh et Picasso dans une pâte épaisse à l'excès, « une manière, écrit-il, de symboliser mon mépris de l'art académique ». Esprit curieux, avide de savoir et de connaissances, Tàpies se passionne très tôt pour la musique, la littérature et la philosophie. Il lit Nietzsche, Schopenhauer et Sartre, dont les théories existentialistes le marqueront. Il découvre également Heidegger, qu'il commente ainsi : « cette distinction de l'existence en inauthentique (le tumulte du monde, la réalité banale et quotidienne) et authentique (le véritable règne de l'être) me semblait confirmer l'aversion spontanée que j'avais à l'égard de ce que j'appelais la réalité officielle ». Par ailleurs, c'est auprès des penseurs extrême-orientaux que l'artiste ira chercher les données d'une pratique basée sur la méditation et l'intensité du repli sur soi. Avec le mystique catalan du xiiie siècle, Ramón Llull qu'il illustre en 1986, Tàpies dit : « Tenter de retrouver Ramón Llull, c'est réactualiser le témoin éclairé de la rencontre de trois cultures : arabe, juive et chrétienne. »

Durant ces années de formation, Tàpies se lie d'amitié avec tout ce que le milieu intellectuel catalan compte d'esprits éclairés, parmi lesquels Joan Prats, initiateur de l'avant-garde barcelonaise, le poète Joan Brossa et le philosophe Arnaud Puig avec lesquels il fonde, en 1948, la revue Dau al Set (Dé de sept), dont la volonté est de s'opposer au milieu académique et réactionnaire de l'époque. Toujours en l948, Tàpies expose pour la première fois au Salon d'octobre. Les œuvres de cette période, influencées par l'esthétique surréaliste, réservent une place majeure à la figure humaine et sont marquées par ses préoccupations tant littéraires que politiques (l'Espagne est alors en plein franquisme).

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    On pourrait enfin découvrir sans peine dans l'œuvre de Joan Miró et de Salvador Dalí des marques de l'atavisme catalan, de ce fonds vivace dont Antoni Tàpies montre aussi, à sa manière, l'inépuisable fécondité.