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GADES ANTONIO (1936-2004)

Révolutionnaire et rénovateur sont les deux termes qui caractérisent le mieux le danseur et chorégraphe espagnol Antonio Gades qui, pour n'être ni gitan ni andalou, a su incarner le flamenco dans toute sa pureté primitive. Si Gades n'a pu achever son Don Quichotte, il laisse toutefois derrière lui une œuvre immortalisée notamment par les trois films de Carlos Saura, témoignages vibrants de la rigueur de l'artiste.

De la photographie à la création du ballet flamenco

Né le 14 novembre 1936 à Elda, village de la province d'Alicante, Antonio Esteve Ródenas est le fils d'une famille d'ouvriers républicains. À Madrid, où sa famille s'est installée, il quitte l'école à l'âge de onze ans. Pour échapper à la pauvreté, il sera groom avant d'enchaîner les petits métiers. De son passage comme assistant photographe, il gardera le sens du cadrage et l'art d'assembler les séquences. Avec ce qu'il gagne, il s'offre ses premiers cours de danse et entre à seize ans dans la compagnie du Ballet espagnol de Pilar Lopez. En prenant le nom de Gades – nom que portait la ville de Cadix au temps des Romains –, il devient, à dix-sept ans, premier danseur de cette compagnie et affirme sa conception de la danse flamenco. Pour lui, la danse doit être aussi légère que la bande de terre qui s'avance dans l'Atlantique et sur laquelle se situe Cadix. Son style ramassé, nerveux et débarrassé de fioritures, il le doit à Vicente Escudero son maître, rencontré en 1955, dont il admire l'esthétique nouvelle et dont il retient la façon de danser les bras levés au-dessus de la tête. Les points communs entre eux ne manquent pas : même allure, même corps sec, de plus tous deux sont des payos (non gitans). Gades fait sien les préceptes énoncés par Escudero : virilité, sobriété, verticalité, calme et stabilité, respect de la tradition. En 1961, il quitte la troupe de Pilar Lopez et part pour Rome travailler avec des artistes classiques italiens (Anton Dolin, Carla Fracci). Il vient compléter sa formation classique à Paris, où il prend des cours avec Kiss Nora (dite Madame Nora) et Nina Thikhanova. Il saura tirer le meilleur de tous ceux qu'il rencontrera.

De retour à Madrid, Antonio Gades fonde, en 1963, sa première compagnie qui se produit à Barcelone dans un tablao (cabaret flamenco), Los Tarantos, où ses admirateurs sont les peintres catalans Joan Miró, Antoni Tàpies et Pablo Picasso. Cette même année, le film Los Tarantos, de Rovira Beleta, où il a pour partenaire la danseuse Carmen Amaya, marque ses débuts au cinéma. Dans une des scènes cultes du film il exécute une farrucca (danse d'origine galicienne sur un rythme régulier à temps binaire ; adaptée à l'homme, elle est lente, grave et noble) dans les rues de Barcelone. Invité à New York pour l'exposition mondiale de 1964, il sent spontanément qu'il doit rompre avec ce qui se fait alors en Espagne sur le plan du flamenco théâtral. Il va donc épurer cette danse pour n'en garder que la rigueur primitive. Noces de Sang (1974), d'après l'œuvre de Federico García Lorca, en est l'illustration parfaite. En voyant le spectacle, Carlos Saura dira : « J'aime ce que Gades a fait de Lorca... Gades ne voulait pas d'une interprétation à l'andalouse avec des gitans et des murs blancs. Au contraire, il a éliminé le superflu et gardé dans une tonalité plutôt castillane l'essence de ces choses qui ont une racine profonde et la force d'un mythe. »

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Antonio Gades - crédits : ullstein bild/ Getty Images

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