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APOLOGÉTIQUE

Considérée comme discipline autonome, l'apologétique est de date récente ; mais l'apologie, qu'elle soit juive, catholique, orthodoxe ou protestante, est aussi ancienne que le judaïsme ou le christianisme. Bien qu'elle ait conduit souvent à la controverse, l'apologétique ne doit pas être identifiée avec elle. La controverse accuse les différences et les oppositions ; elle entraîne plutôt une attitude de fermeture aux idées d'autrui. L'apologétique, au contraire, peut et doit garder une attitude d'ouverture. Ses « raisons » sont celles du dialogue, et d'un dialogue non seulement extérieur mais intérieur au croyant : elle cherche à établir les motifs qu'à chaque époque le fidèle reconnaît à sa croyance, en face de sa propre incroyance, et à les communiquer à autrui.

La littérature apologétique juive

Le judaïsme antique n'a eu une littérature apologétique qu'à partir du moment où il a été en contact avec les peuples environnants. On doit mentionner le Contre Apion de Flavius Josèphe (95 apr. J.-C.), adressé aux Romains, et l'œuvre philosophique de Philon qui, bien qu'elle n'ait jamais été reconnue par le judaïsme orthodoxe, a constitué une première tentative d'explication du judaïsme par rapport à la pensée hellénique.

C'est plus tard, au ixe siècle seulement, qu'a commencé de s'opérer dans le judaïsme la rencontre de la révélation et de la raison philosophique, lorsque les lettrés ont eu connaissance, dans des traductions arabes, des chefs-d'œuvre de la philosophie grecque, Pythagore, Platon, Aristote, Plotin ont été alors rendus accessibles aux maîtres de la synagogue (geonim). Déjà les philosophes arabes dits motazilites avaient tenté d'exprimer en termes philosophiques les grandes données du monothéisme : unité de Dieu, création du monde, liberté humaine, justice divine, problème du bien et du mal. Leur méthode d'investigation, le kalam, avait donné naissance à la première théologie rationnelle. Mais celle-ci reposait sur le concordisme musulman entre révélation et raison. Saadia ben Joseph de Fayyoum (882-942) inaugura une recherche semblable au sein du judaïsme et appliqua aux données de la Bible la dialectique du kalam. Son ouvrage fondamental, Certitudes et Connaissances, inspiré par la pensée du Talmud, soutient qu'il y a harmonie entre la révélation, la tradition et la raison.

Il y eut bientôt une réaction. Dans le Kuzari (1140), Judah Halevi imagina un dialogue entre un chrétien, un musulman et un rabbin en présence du roi des Khazars, qui finit par se convertir au judaïsme ; il fit une critique sévère de la philosophie du kalam et attacha la certitude non pas à la démarche de la raison, mais à la lettre de la Torah donnée par Dieu à Moïse.

Dans la période qui suivit, l'effort rationnel fut repris, mais l'aristotélisme prit peu à peu le pas sur le kalam et sur le néo-platonisme. Dans le Guide des égarés (1195) Moïse Maimonide prouva que la foi d'Israël et la sagesse grecque, bien que différentes dans leur origine, sont identiques dans leur essence et doivent se rejoindre pour les croyants. La spéculation rationnelle put être considérée alors comme une voie vers la connaissance mystique. D'abord rejetée par le judaïsme orthodoxe, l'œuvre de Maimonide fut acceptée par la suite, et elle exerça une influence décisive sur la pensée chrétienne du Moyen Âge. Elle garde un grand crédit dans la pensée juive contemporaine.

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Écrit par

  • : directeur du Centre d'études Istina et de la revue Istina

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