APOPTOSE : UN CONCEPT NOVATEUR
Comment une cellule meurt-elle ? Ce peut être à la suite d'une agression extérieure traumatique ou infectieuse : elle est alors accompagnée de lésions et d'une réaction inflammatoire locale, en pratique par un phénomène de nécrose. Le grand mérite de John F. Kerr et de ses collaborateurs, dans les années 1960, est d'avoir identifié, sur le plan morphologique d'abord, un phénomène de mort cellulaire totalement différent : en quelques heures, le noyau de la cellule se fragmente puis s'organise en masses denses, son ADN se clive en fragments réguliers tandis que la cellule gonfle et est très rapidement absorbée par des cellules phagocytaires. Il ne reste aucune trace de la cellule morte et aucune réaction inflammatoire n'apparaît : ce phénomène d'apoptose (un nom attribué en 1972 qui évoque la chute des feuilles) constitue un mécanisme homéostatique général. L'apoptose, encore appelée mort cellulaire programmée, est devenue le compagnon inséparable de la différenciation et de la division cellulaire dans la morphogenèse et la physiologie, ce qu'on peut résumer en disant que ce mécanisme élimine les cellules incorrectes ou anormales sans toucher les cellules avoisinantes. Il s'agit d'un mécanisme complexe initié de l'extérieur ou de l'intérieur de la cellule, qui mobilise des cascades de protéases et dont l'équilibre est maintenu par l'action des produits de gènes pro- et anti-apoptotiques. La dérégulation de ces gènes mène à des pathologies, le cancer étant souvent associé à un défaut d'apoptose. Il s'agit d'une découverte conceptuellement et pratiquement aussi importante que celle de la division cellulaire au xixe siècle.
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Écrit par
- Gabriel GACHELIN : chercheur en histoire des sciences, université Paris VII-Denis-Diderot, ancien chef de service à l'Institut Pasteur
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Média