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APÔTRES & APOSTOLAT

L'apostolat dans l'Église chrétienne

Le vocabulaire est significatif. Jusqu'à l'époque moderne, le substantif « apostolat » et l'adjectif « apostolique » ont gardé une référence aux (douze) apôtres : « (votre, notre) Apostolat » était un titre donné aux évêques (jusqu'au viiie siècle en Occident), puis pratiquement réservé au pape ; « Apostolique » de même. De plus, le mot a été très usité depuis saint Augustin pour désigner la manière de vivre des apôtres, vita apostolica ou vie commune et pauvre ; il a même désigné, aux xiie et xiiie siècles, des sectes qui faisaient profession de mener une telle vie. Depuis le Symbole dont le concile de Chalcédoine (451) attribuait le texte au concile de Constantinople (381), « apostolique » est un des attributs de l'Église dans le Symbole. En ce sens dogmatique, le mot exprime l'identité de l'Église à travers le temps quant à ses principes essentiels, soit de doctrine, soit de culte, soit d'organisation hiérarchique. Ces principes proviennent des apôtres. S'agissant de la suite des évêques sur le même siège et dans le même office, on parle de succession apostolique, qui implique en premier lieu l'identité de la même foi. Comme Rome est le seul siège apostolique en Occident et qu'elle est le siège de Pierre, premier des apôtres, le titre de « siège apostolique » est, depuis le viiie siècle, réservé à celui de Rome en Occident ; son titulaire a souvent reçu le nom de « (Seigneur) Apostolique ».

À partir du xviie siècle, les mots « apostolat, apostolique » ont été employés dans un sens plus large pour évoquer l'activité de ceux que l'Église envoie prêcher l'Évangile et les vertus ou dispositions qui font le missionnaire. On parle de zèle apostolique, on dit d'un fidèle animé par ce zèle qu'il est un véritable apôtre. Depuis le xixe siècle au moins, on parle d'apostolat pour désigner l'ensemble des activités par lesquelles on vise à étendre le règne de Dieu et l'influence salutaire de l'Évangile. C'est à peu près ainsi que l'a défini Pie XII (discours des 8 déc. 1947, 25 janv. 1950, 14 oct. 1951), ou plus largement encore Karl Rahner : l'ensemble des actions exerçant une influence légitime sur autrui en vue de son salut. Les documents officiels de la hiérarchie catholique parlent couramment d'apostolat en ce sens large, et même, surtout depuis Pie XI, d'apostolat des laïcs. Le décret du IIe concile du Vatican sur l'apostolat des laïcs (Apostolicam actuositatem, 18 nov. 1965[Ap. Act.]) identifie formellement mission et apostolat, et définit celui-ci : toute activité du Corps mystique qui tend à étendre le règne du Christ à toute la terre, à faire participer les hommes à la rédemption et au salut, à ordonner en vérité le monde entier au Christ.

L'inflation verbale de l'époque moderne a fait que, seul le vocabulaire religieux gardant une certaine force et un certain prestige, on lui a emprunté souvent ses expressions en les prenant indûment en un sens analogique excessivement large. On parle du sacerdoce du médecin, d'une maladie qui est un vrai calvaire, etc. ; et de même d'un « apôtre du sport », d'un « apôtre de la prophylaxie » ; sur un mur de l'hôtellerie de la Sainte-Baume (Var), on lit une inscription à la mémoire de N..., « apôtre du cyclotourisme ». On dit d'un propagandiste zélé et désintéressé que son activité est pour lui « un véritable apostolat »... Il y a là un hommage rendu à l'apostolat, mais aussi un abus, qu'il convient de dénoncer.

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Écrit par

  • : professeur à l'Institut catholique de Paris

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