DIOPHANTIENNES APPROXIMATIONS
Répartition modulo 1
Quoiqu'il ne s'agisse pas à proprement parler d'approximation diophantienne, on peut ranger dans cet article l'étude des suites de nombres réels, modulo 1. Il s'agit, pour une suite (un), de la répartition sur [0, 1[ de {un} = un − [un]où[un]est la partie entière de un.
Ce n'est qu'en 1884 que Kronecker établit que, si θ est irrationnel, ses multiples nθ sont, modulo 1, partout denses sur [0, 1[. Cela signifie que, quel que soit x ∈ [0, 1[ et quel que soit ε > 0, il existe une infinité de valeurs de n pour lesquelles |{nθ} − x| < ε. En effet, {n1θ} est différent de {n2θ} si n1 ≠ n2 ; il existe donc au moins un point d'accumulation des nombres (nθ), c'est-à-dire qu'on peut trouver n1 et n2 avec (n1 − n2) θ ∈ ]0, ε[, d'où les multiples m(n1 − n2)θ qui fournissent des points, modulo 1, à moins de ε de tout x de [0, 1[.
On remarquera que le problème de la répartition sur un cercle des points d'abscisse curviligne nθ conduit au même résultat si θ est incommensurable à π (ici on raisonne modulo 2 π). De même, par exemple, l'étude des premiers chiffres du nombre 2n, écrit en base 10, conduit à étudier la mantisse de n log 2, c'est-à-dire sa répartition modulo 1. Comme log 2 est irrationnel, puisque 10p/q ≠ 2, on en déduit qu'on peut toujours trouver une infinité de valeurs de n telles que 2n commence par k chiffres quelconques imposés.
La notion d' équirépartition fut mise au point par Weyl en 1916. La suite (un) est dite équirépartie modulo 1 si les {un} sont denses sur [0, 1] et si, de plus, pour tout [α, β] ⊂[0, 1] le nombre ϕN(α, β) d'indices n pour lesquels n ≤ N et {un} ∈ [α, β] vérifie :
une condition suffisante pour que la suite (f (n)) soit dense sur [0, 1[ est que :c'est ainsi que la suite (θ Logan) est dense sur [0, 1[ modulo 1, quel que soit le nombre réel θ non nul et le nombre réel a > 1.Dès 1912, Bohl, Sierpinski et Weyl établissent l'équirépartition de (nθ) pour θ irrationnel cependant que Fejer donne des conditions suffisantes d'équirépartition ou de non-équirépartition : Si f est strictement croissante, à dérivée continue monotone, avec f (x) → + ∞, f′(x) → 0, xf′ (x) → ∞ quand x → + ∞, il y a équirépartition. Si au contraire xf′(x) → 0, il n'y a pas équirépartition. On en déduit les résultats concernant (θ Logan) (équirépartition si a > 1, non-équirépartition si a ≤ 1). En 1916, Weyl énonce le critère d'équirépartition : celle-ci est caractérisée, pour une suite f (n), par le fait que, pour tout entier h non nul,
est un o(n) pour n → ∞.Plus tard (1933), Koksma établit que la suite λ tn, où λ est réel non nul fixé, est équirépartie modulo 1 pour presque tous les t > 1 (mais on ne connaît aucun t pour lequel on ait établi cette équirépartition ; on pense par exemple que (3/2)n est équiréparti modulo 1, mais on n'a pas pu le démontrer jusqu'ici). En revanche, une catégorie importante de nombres algébriques échappe à cette équirépartition : il s'agit des nombres de Pisot-Vijayaragavan, qui sont des entiers algébriques θ tels que θ > 1, les conjugués θi, pour i = 2, 3, ..., s (s est le degré de θ), étant tous en modules inférieurs à 1. Il s'ensuit que θn converge vers zéro modulo 1 (raisonner sur θn + θn2 + ... + θns qui est un entier). Salem a démontré en 1944 que l'ensemble S des nombres de Pisot était fermé.
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Écrit par
- Marcel DAVID : professeur à la faculté des sciences de Reims
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