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AQUAPORINES

Une découverte majeure et fortuite

Un hématologue, Peter Agre, de l'université Johns Hopkins à Baltimore (Maryland), étudiait les antigènes du groupe sanguin Rh (pour rhésus). Il faisait produire à des lapins des anticorps en réponse à un polypeptide Rh partiellement purifié, et dénaturé. Ses préparations s'avérèrent systématiquement contaminées par une protéine, dont la masse moléculaire était 28 kilodaltons. De plus, cette protéine était surabondante, puisqu'un seul globule rouge la tirait à 400 000 exemplaires.

À quoi pouvait-elle donc servir ? Il apparut rapidement qu'elle faisait partie de la grande famille des protéines tétramères transmembranaires. Ce qui suggéra qu'elle servait de canal ; mais pour aider quelle entité à traverser les membranes cellulaires ? Agre et ses collaborateurs retrouvèrent la même protéine dans les tubules rénaux humains. Que peuvent avoir en commun ces derniers et des globules rouges, sinon une grande perméabilité à l'eau ? L'aquaporine-1 (ou AQP1) avait ainsi été découverte, en 1991, ce qui valut à Peter Agre le prix Nobel de chimie en 2003. Le mot est transparent : le suffixe -ine, car c'est une protéine, le préfixe aqua- parce qu'il s'agit d'un transfert aqueux, et la racinepor car il s'agit d'un pore présent dans les membranes cellulaires. L'auteur de cette grande percée était un hématologue, et non, comme on aurait pu l'escompter, un physiologiste du rein, ou même un physiologiste tout court.

On a là un exemple de plus de l'importance de la recherche fondamentale, et de la vanité de la recherche ciblée. Le bon sens milite pour cette dernière ; pourtant, elle ne s'avère qu'inutile gaspillage de l'argent public. On conclura dans le même élan qu'un travail d'amateur peut avoir du bon. L'hyperspécialisation n'est pas la seule voie du succès.

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Écrit par

  • : professeur honoraire à l'École polytechnique et à l'université de Liège (Belgique)

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