ARAGON
Le mot « Aragon » désigne une rivière pyrénéenne, affluent de l'Èbre : elle a donné son nom au petit État chrétien qui s'est formé dans sa haute vallée, puis à partir du xie siècle a conquis la vallée moyenne de l'Èbre, s'est uni à la Catalogne, a annexé le royaume de Valence. Il faut donc distinguer l'Aragon proprement dit et la couronne d'Aragon, qui englobait aussi ces autres territoires. Dans les deux sens, l'Aragon est une création de la Reconquista.
L'absence d'unité géographique a fortement influé sur le développement artistique du pays, et davantage encore, l'isolement imposé par les obstacles qui se dressent de tous côtés : vers la France, vers la Castille et même vers la Méditerranée à laquelle l'Èbre ne parvient qu'en sciant une succession de chaînes côtières. Cependant, l'influence de ce milieu naturel ne fut vraiment déterminante qu'au Moyen Âge, c'est-à-dire à l'époque qui vit fleurir un art pleinement aragonais.
Géographie
Ne comprenant aujourd'hui que les provinces de Huesca, de Saragosse et de Teruel, l'Aragon (1 250 000 habitants en 2004) est caractérisé par une personnalité historique incontestable et de fortes contraintes naturelles. Les Pyrénées aragonaises (Pyrénées centrales ou hautes en France), du pic d'Anie (ouest) au massif de la Maladetta (est), sont composées de la couverture sédimentaire des massifs centraux (zone axiale). Plissée et basculée vers le sud, celle-ci dessine de hautes crêtes calcaires parallèles qu'une dépression longitudinale creusée dans les roches tendres sépare des sierras externes dominant le bassin de l'Èbre moyen. Les torrents affluents de ce dernier, bien alimentés, ont creusé de profondes percées transversales qui ont favorisé les relations entre la plaine et la montagne. La vie rurale y est encore dominée par l'élevage montagnard des bovins et par la forêt (bois et cellulose). À l'opposé, le système Ibérique, bourrelet faillé et plissé sur le rebord nord-est de la Meseta, est une montagne sèche et pauvre qui abrite un élevage ovin transhumant, et dont les seuls foyers de peuplement sont les vallées irriguées (Jalón). Deux voies de passage s'y distinguent : celle du Jalón, de l'Èbre moyen à la Meseta castillane, abrite la route Saragosse-Madrid et donne quelque importance à la position de Calatayud dans un bassin intramontagnard ; et celle de son affluent, le Jiloca (vers la Méditerranée et Valence), sur laquelle se trouve le modeste carrefour de Teruel.
Dans la cuvette de l'Èbre moyen, vaste gouttière comblée de sédiments détritiques tertiaires et quaternaires, barrée à l'aval par les Cordillères catalanes, l'Èbre et ses affluents ont créé, en s'enfonçant dans les roches tendres (marnes), un véritable musée de formes dues à l'érosion glaciaire et à l'action du climat semi-aride : terrasses, glacis, buttes témoins et plateaux structuraux, bad-lands (Monegros). Protégé de tous côtés par des barrières orographiques, le centre du bassin présente un climat à tendance continentale, très sec : moins de 350 millimètres de pluie par an. Deux paysages s'y opposent donc fortement : la province de Saragosse (800 000 hab. en 2004), qui concentre les deux tiers des emplois, en particulier industriels et tertiaires, et les provinces de Huesca et de Teruel, peu peuplées, qui sont victimes de l'exode rural vers la Catalogne et vers Saragosse, mais qui conservent un secteur agricole important. Les vallées sont les axes de l'expansion économique et, avec les villes, les seules zones dont la population s'accroisse. Le réseau de communications, dont l'axe principal est l'Èbre, donne toute sa valeur au carrefour de Saragosse, capitale régionale incontestable (660 000 hab. en 2005, cinquième ville d'Espagne), tandis que Huesca (48 000 hab.) et Teruel[...]
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Écrit par
- Roland COURTOT : agrégé de l'Université, maître assistant à l'Institut de géographie d'Aix-Marseille
- Marcel DURLIAT : professeur émérite d'histoire de l'art à l'université de Toulouse-Le-Mirail
- Philippe WOLFF : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Toulouse
Classification
Médias
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