ARCHÉOLOGIE (Archéologie et société) Archéologie et enjeux de société
Archéologie préventive et service public
En 1992, l'ensemble des pays d'Europe signait la convention de Malte sur la préservation du patrimoine archéologique. Ratifiée par la France en 1994, elle y fut mise en pratique par la loi du 17 janvier 2001 sur l'archéologie préventive, affirmant dès son article 1er : « L'archéologie préventive, qui relève de missions de service public, est partie intégrante de l'archéologie. Elle est régie par les principes applicables à toute recherche scientifique. Elle a pour objet d'assurer, à terre et sous les eaux, dans les délais appropriés, la détection, la conservation ou la sauvegarde, par l'étude scientifique, des éléments du patrimoine archéologique affectés ou susceptibles d'être affectés par les travaux publics ou privés concourant à l'aménagement. Elle a également pour objet l'interprétation et la diffusion des résultats obtenus. » L'article 2 précise en outre que « L'État veille à la conciliation des exigences respectives de la recherche scientifique, de la conservation du patrimoine et du développement économique et social ». Ainsi, pour tous les États signataires de la convention de Malte, l'archéologie préventive est bien une obligation, y compris dans la diffusion de ses résultats – même si cette obligation ne peut que rester de l'ordre du compromis.
Plus concrètement, la loi française de 2001 confie les fouilles préventives à un établissement public de recherche, l'Institut national de recherches archéologiques préventives (I.N.R.A.P.), créé en 2002 et placé sous la double tutelle du ministère de la Recherche et de celui de la Culture. Cet institut, qui a pris la suite d'une agence de moyens du ministère de la Culture, l'Association pour les fouilles archéologiques nationales (A.F.A.N), compte environ 1 500 archéologues et effectue environ 2 000 fouilles chaque année.
La loi de 2001 a d'ailleurs été l'objet d'un débat sur la conception même de l'archéologie préventive, en France et plus généralement dans l'Union européenne. On sait en effet qu'au sein de celle-ci, deux visions fort différentes s'opposent en matière de services publics. Pour les uns, ils relèveraient presque tous du « marché » et de la concurrence commerciale privée. Pour les autres, il existe des domaines où l'État doit garder le contrôle : il s'agit des « services d'intérêt général », selon la terminologie bruxelloise, applicable par exemple à l'armée, à la police, à la sécurité sociale. Concernant l'archéologie préventive, certains pays, comme la Grande-Bretagne et l'Espagne, ont déjà opté pour une certaine forme de privatisation contrôlée, d'autres pour la seule responsabilité de l'État – comme la Grèce, les pays scandinaves et la majorité des Länder allemands. D'autres enfin se situent à mi-chemin, comme c'était le cas pour la France jusqu'en 2001.
Avec la loi promulguée cette année-là et la création de l'I.N.R.A.P., l'archéologie préventive s'est trouvée clairement placée sous la responsabilité directe de l'État. Toutefois la loi de 2001, validée par la Commission de Bruxelles, a été amendée en 2003 par la nouvelle majorité parlementaire, qui a souhaité laisser la détection (ou diagnostic) des sites archéologiques dans le domaine public, mais place la fouille proprement dite dans un secteur concurrentiel encore à naître. Dans tous les cas, l'ensemble des pays de l'Union européenne devront faire un choix au cours des prochaines années, dans un domaine éminemment sensible puisqu'il touche aussi bien à l'exception culturelle qu'à l'identité nationale. De même, il faudra sans doute unifier le statut légal des objets archéologiques découverts,[...]
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Écrit par
- Jean-Paul DEMOULE : professeur émérite à l'université Paris-I-Panthéon-Sorbonne et à l'Institut universitaire de France
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