ARCHÉOLOGIE (Archéologie et société) Histoire de l'archéologie
Progrès des méthodes et des techniques
Après la constitution de ce socle de connaissances et de méthodes, le xxe siècle sera marqué, singulièrement durant son deuxième tiers, par de nombreuses avancées qui déboucheront sur une nouvelle définition de l'archéologie. Jusque-là simple « auxiliaire de l'histoire », elle devient peu à peu une science autonome qui étudie les sociétés humaines à travers leurs traces matérielles – tout comme l'histoire les étudie à travers leurs textes ou la sociologie à travers leurs comportements.
Il y eut d'abord des progrès décisifs dans les méthodes de fouilles, jusque-là très approximatives. En Grande-Bretagne, Mortimer Wheeler définit dans les années 1930 la méthode stratigraphique, qui consiste à établir un quadrillage général de la fouille et à laisser subsister entre chaque carré fouillé des banquettes qui sont autant de témoins de la succession des couches, et donc des phases d'occupation. Symétriquement, à la suite des archéologues soviétiques qui souhaitaient, plus que la chronologie, étudier l'organisation de l'espace, et donc de la société, en un temps donné, les préhistoriens préconisent de fouiller dorénavant horizontalement. En France, André Leroi-Gourhan va mettre en évidence avec une très grande minutie le plan et le mode de vie des campements de chasseurs paléolithiques il y a 15 000 ans. Pour les périodes plus récentes de la pré- et protohistoire, où les sites peuvent couvrir plusieurs hectares, on commence à utiliser à partir du début des années 1950, à la suite de l'archéologue tchèque Bohumil Soudsky sur le site néolithique de Bylany, des engins mécaniques pour le décapage et l'évacuation des terres arables qui recouvrent normalement les niveaux archéologiques.
Principales grottes ornées d'Europe
Encyclopædia Universalis France
Le site tchèque de Bylany fut aussi l'un des premiers où l'on expérimenta les nouvelles méthodes de traitement de l'information, cartes mécanographiques d'abord, puis bientôt informatique. C'est également par des cartes mécanographiques qu'André Leroi-Gourhan montra statistiquement, au début des années 1960, qu'il existait une structure d'ensemble dans les grottes ornées paléolithiques, tant dans le choix des thèmes que dans leur localisation. L'archéologie désormais ne se contente plus d'étudier de beaux objets. Elle s'intéresse à l'ensemble de la culture matérielle d'une civilisation. Confrontée à des données très nombreuses, mais souvent relativement simples (plusieurs centaines de milliers de fragments de poterie par exemple), elle aura été l'une des premières sciences humaines à recourir à l'informatique, non seulement pour inventorier mais aussi pour classer et traiter statistiquement ses informations.
Nécropole gauloise, Grézac, Charente-Maritime
Jacques Dassié/ archaero.com ; CC BY 2.5
De nombreux progrès furent accomplis à partir de ces mêmes années 1950-1960 dans les techniques physico-chimiques de datation : carbone 14 (bientôt calibré par la dendrochronologie), potassium-argon, uranium-thorium, thermoluminescence, archéomagnétisme, résonance paramagnétique électronique, racémisation des acides aminés, etc. On parla en particulier de « révolution du carbone 14 », cette technique ayant notamment permis d'octroyer plusieurs millénaires supplémentaires de durée au néolithique européen, comme pour les monuments mégalithiques européens, que l'on croyait inspirés des tombes monumentales de Mycènes sinon d'Égypte, et qui se retrouvaient ainsi bien antérieurs à ces manifestations. Les techniques de détection des sites progressèrent également : photographie aérienne (née dans les années 1930), méthodes électromagnétiques mesurant les anomalies du sous-sol, thermographie et, plus tard, radar. Il en ira de même des techniques d'enregistrement, telle la photogrammétrie, puis les systèmes d'information géographiques (S.I.G.), ou la saisie optique[...]
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Écrit par
- Jean-Paul DEMOULE : professeur émérite à l'université Paris-I-Panthéon-Sorbonne et à l'Institut universitaire de France
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Médias
Tablette cunéiforme, royaume d'Ougarit
De Agostini
Laocoon
Bridgeman Images
Fresques mythologiques, sacellum des Augustales, Herculanum
Kated/ Shutterstock
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