ARCHÉOLOGIE (Archéologie et société) Histoire de l'archéologie
Enjeux contemporains
Cet accent mis sur les enjeux idéologiques de l'archéologie a eu d'autres conséquences : les populations autochtones, notamment en Australie et en Amérique du Nord, ont contesté le droit pour les archéologues occidentaux de fouiller la terre de leurs ancêtres, réels ou supposés. Ils ont même parfois obtenu qu'on leur restitue, à des fins de réinhumation (« reburial »), des squelettes et des objets anciens – ce qui était plus aisé que de leur rendre leurs terres. Plus généralement, les détournements de l'archéologie dans un but nationaliste se sont poursuivis, des Balkans au Proche-Orient, souvent non sans conséquences sanglantes.
Ses efforts théoriques n'ont pas empêché l'archéologie de continuer à faire, tout au long du xxe siècle, des découvertes spectaculaires, depuis la tombe de Toutankhamon, en 1922, jusqu'à Lucy en 1974 et les autres australopithèques, sans oublier l'armée de terre cuite de l'empereur Shihuang des Qin de Chine (1974), la première métallurgie de l'or à Varna en Bulgarie (1972), la tombe de Vix (1952) et son vase géant, Ötzi (1991) l'homme des glaces trouvé dans le Tyrol, les grottes préhistoriques peintes Cosquer (1991) et Chauvet (1994), ou encore ce disque astronomique en bronze trouvé à Nebra en Allemagne (1999)...
Mais l'évolution marquante la plus récente est sans doute la prise de conscience des destructions croissantes qui affectent notre patrimoine archéologique, par définition non renouvelable. En France par exemple, près de 700 kilomètres carrés de sol sont affectés chaque année (soit 20 m2 à la seconde !) par des travaux d'aménagements, de construction d'infrastructures et de bâtiments, de voies de communication, de zones industrielles, etc., qui entraînent à chaque fois la disparition de sites archéologiques contenus dans le sous-sol. Les pays les plus industrialisés se sont peu à peu dotés de législations adaptées. Ainsi l'ensemble des pays européens a signé en 1992 la Convention de Malte sur la protection du patrimoine archéologique, que la France a transcrit sous la forme de la loi de 2001 sur l'archéologie préventive. Mais la situation est beaucoup plus préoccupante dans les pays moins riches ou politiquement instables, pour lesquels l'archéologie ne constitue pas une priorité, et qui sont de plus en but à des destructions ou des pillages massifs et organisés, comme en Afghanistan ou en Libye lors des révoltes de 2011.
L'intérêt croissant du public pour l'archéologie est certainement l'une des clés du développement de l' archéologie préventive. Encore faut-il que les archéologues soient à même de rendre accessibles les résultats de leurs recherches. Si la muséographie archéologique s'est longtemps située dans la tradition élitiste des premières collections constituées par les princes italiens (ce dont témoignent encore les galeries grecques et romaines du musée du Louvre par exemple), celle-ci s'est profondément transformée dans de nombreux pays, notamment scandinaves, anglo-saxons ainsi qu'au Japon. On y propose aussi bien des parcs archéologiques, avec des reconstitutions en grandeur nature, que des musées et expositions utilisant toutes les ressources des nouvelles technologies, ou encore des émissions régulières diffusées à la télévision, à la fois rigoureuses et pédagogiques.
Entre l'admiration originelle pour l'art antique redécouvert et la reconstitution patiente des sociétés humaines et de leur environnement matériel à travers la collecte et l'analyse minutieuse de millions d'informations ponctuelles, l'archéologie d'aujourd'hui n'a plus grand chose à voir avec ce qu'elle fut un demi-millénaire plus tôt. Ses enjeux scientifiques, mais aussi culturels, voire sociaux et politiques, ne sont pas non plus les mêmes et ont accompagné le mouvement[...]
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Écrit par
- Jean-Paul DEMOULE : professeur émérite à l'université Paris-I-Panthéon-Sorbonne et à l'Institut universitaire de France
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