ARCHÉOLOGIE (Méthodes et techniques) L'archéologie environnementale
Les premiers agriculteurs du Néolithique ont-ils choisi les meilleures terres ?
Jusqu'à une époque très récente, l'arrivée des premiers agriculteurs du Néolithique, il y a près de sept millénaires, et le développement d'une économie de production en Europe occidentale étaient associés à un épisode climatique favorable, appelé Atlantique par les palynologues. Cependant, les données récentes de la géoarchéologie et des études glacio-chimiques des carottes polaires remettent en cause cette remarquable concordance. Si la température moyenne était plus élevée que l'actuelle au début de la période atlantique (il y a 8 000 ans), l'irrégularité du climat et les changements de température apparaissent importants. Les écarts de température montrent une amplitude de 3 0C. Ainsi, les températures estimées à partir de la teneur en 18O mesurée dans les échantillons prélevés dans les carottes de glace du Groenland indiquent une variation minimale de — 1 0C entre 5500 et 5200 avant J.-C. et une variation maximale de + 2 0C en moyenne par rapport à l'actuel entre 5700 et 4900 avant J.-C.
Il s'avère qu'à plusieurs reprises le bassin du Rhône a été affecté par des épisodes de crues liés à une détérioration climatique humide sensible depuis l'Europe du nord-ouest et l'Europe continentale jusqu'au nord du bassin Méditerranéen. Ces détériorations atteignent la vallée du Rhône plusieurs fois au cours du Néolithique (vers 5400, 4700, 4200, 3400 et 2300 av. J.-C.). Elles attestent d'une augmentation de la pluviosité sur toute l'année et d'un rafraîchissement climatique, enregistrés également par les lacs jurassiens et alpins, les glaciers des Alpes suisses, autrichiennes et scandinaves, et par la fluctuation de la limite supérieure ou septentrionale de la forêt. L'origine de ces épisodes torrentiels suscite de nombreuses questions, car ils impliquent de fortes précipitations et un paysage ouvert, peu boisé, favorable aux phénomènes de ruissellements. Ainsi, au début du Néolithique, les sols de la vallée du Rhône, parce qu'ils ont été abondamment lessivés, ne sont pas favorables à l'agriculture. À partir de 5200-5100 avant J.-C., lorsque des conditions de calme hydrologique s'installent, les sols sont bonifiés naturellement. Cette évolution peut expliquer la seconde expansion agraire à la fin du Néolithique ancien, entre 5200 et 4900 avant J.-C.
Les données acquises sur l'évolution du peuplement au Néolithique ancien dans la moyenne vallée du Rhône, en utilisant deux critères chronologiques (chronoculturel et radiocarbonique), révèlent deux phases d'implantation majeure d'une inégale intensité, séparées par un vide d'occupation entre 5400 et 5200 avant J.-C. environ. À la lumière des récentes découvertes en paléoécologie, concernant par exemple les cycles d'incendie sous contrôle climatique, on peut également se demander si les grandes ouvertures créées naturellement et amplifiées de façon opportuniste par les essartages néolithiques dans la chênaie mixte atlantique n'ont pas favorisé les processus d'expansion agropastorale. Plus que l'amélioration du climat, ce serait surtout la mise à disposition de grandes surfaces ouvertes par le feu qui pourrait se révéler être un vecteur de l'expansion néolithique.
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Écrit par
- Stéphanie THIÉBAULT : directeur de recherche au C.N.R.S., Maison de l'archéologie et de l'ethnologie, Nanterre
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