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ARCHITECTURE (Matériaux et techniques) Béton

Le porte-à-faux

Il est assez difficile de déterminer l'origine de ce procédé technique qui est le développement de l'encorbellement classique en pierre. François Hennebique, dans sa propre maison construite en 1904 en béton armé, imagine une tour octogonale reposant sur des porte-à-faux de quatre mètres. Le béton armé permet, en effet, de construire non seulement des poutres s'avançant plus ou moins au-delà des poteaux, mais encore des dalles continues, travaillant à la flexion et projetées dans le vide autour d'un noyau.

Cette formule semblait être dans la nature même du béton pour le grand architecte américain Frank Lloyd Wright. Car ce matériau ne se présente pas comme le métal sous forme de poutrelles ou de profilés. C'est une matière moulée qui se prête aux structures continues. Frank Lloyd Wright définit ainsi les possibilités du béton armé : « Il est simple de comprendre les formes nouvelles qu'apporte ce nouveau matériau : des dalles étanches de presque n'importe quelle taille peuvent être portées d'en dessous comme on tient un plateau sur les doigts, le bras tendu : une nouvelle liberté. »

Pour les bureaux de la société Johnson Wax à Racine, Wisconsin, Frank Lloyd Wright édifia une structure « en champignon » qui étonna et inquiéta tant ses contemporains qu'il dut organiser un essai public pour les tranquilliser.

Ces « champignons » sont formés de longues colonnes élancées qui vont s'élargissant et s'épanouissant en un large disque au sommet. Ainsi, le béton armé est utilisé par Frank Lloyd Wright d'une façon qui ne rappelle en rien les charpentes ou les ossatures de métal.

À la même époque, les études de Wright sur le béton armé le conduisent à utiliser la liberté des structures en porte à faux, non plus sous forme d'éléments symétriques comme les dalles-champignons, mais en larges porte-à-faux dissymétriques, projetés dans l'espace. Il conçoit la maison comme une suite d'espaces contigus ouverts sur la nature. La « ville » elle-même est l'espace commun de ces maisons « ouvertes », unies par la nature.

Sa célèbre « maison sur la cascade » est l'expression la plus frappante de cette idée. Elle se présente comme une série de vastes terrasses projetées dans le vide au-dessus de la rivière et de la forêt, autour d'un noyau de murs épais. Dans ce chef-d'œuvre, la qualité essentielle que Wright reconnaît au béton armé est utilisée de façon radicale : la « plasticité » qui est la liberté de dimension et de forme qu'apportent ce matériau et son utilisation en porte à faux. Les terrasses de la maison sur la cascade ne sont pas organisées selon les lois d'équilibre et de symétrie impliquées par la logique structurale. Elles sont projetées dans l'espace dans une volonté d'expression plastique. Là encore, le béton armé est conçu comme une libération des contraintes de structures.

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Palais des sports de Rome - crédits : David Lees/ Corbis Historical/ Getty Images

Palais des sports de Rome

Le Corbusier - crédits : Felix Man/ Getty Images

Le Corbusier

Palais des sports de Rome - crédits : David Lees/ Corbis/ VCG/ Getty Images

Palais des sports de Rome

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