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ARCHIVES

L'usage des archives

L'ouverture à l'histoire

Parmi les sources écrites de l'histoire, les archives constituent des sources « indirectes », qui s'opposent aux sources « narratives ». Ces dernières sont élaborées expressément pour servir à l'histoire, tandis que les archives sont constituées de documents dont ce n'est pas la visée première, mais que l'historien utilise au prix d'un véritable détournement de finalité.

Amorcé dès le xviie siècle, leur usage procède du grand mouvement de renouvellement de l'historiographie qui caractérise les années 1830, moment où l'histoire devient véritablement une science. Dans le contexte de la refondation des études historiques consécutives au bouleversement révolutionnaire, de l'engouement romantique pour le Moyen Âge, de la compétition érudite entre la France et l'Allemagne, le xixe siècle affirme la vocation des documents d'archives à devenir source d'histoire ; dans les années 1880, le triomphe de l'histoire dite positiviste consacre l'identification des archives au « grenier de l'histoire ». Elle privilégie le document authentique isolé (acte royal, traité, document de chancellerie...) d'où elle entend tirer les faits historiques qui constituent la trame de l'histoire essentiellement événementielle qu'elle produit.

Une nouvelle appréhension des documents s'est ensuite dégagée, en liaison avec la révolution d'approche amorcée par le courant des Annales. On a fait appel aux sources massives jusque-là dormantes, état civil, minutes notariales, archives judiciaires, sources fiscales, registres d'enregistrement, de contrôle des troupes, d'inscription maritime... Le document isolé cesse d'avoir valeur par lui-même pour trouver son sens par rapport à ceux qui le précèdent et le suivent, dans le cadre de ces séries susceptibles d'exploitation sur de longues périodes, rendue possible par le développement de l'informatique.

Le bon usage des archives par l'histoire suppose trois prises de conscience : celle des conséquences du principe du respect des fonds, qui suppose que le chercheur transcrive en termes de cheminement administratif son thème de recherche, pour retrouver les fonds d'archives des institutions ou personnes concernées ; celle du détournement de finalité que constitue l'usage que fait l'historien d'une documentation qui n'a en rien été conçue à cet effet ; celle enfin de cette évidence que la finalité historique de la conservation des archives n'intervient qu'après et subsidiairement à la finalité administrative ou de gestion qui résulte directement de l'origine des archives.

Les instruments de recherche

Il s'agit d'un « terme générique pour tout outil de description ou de référence élaboré ou reçu par un service d'archives dans l'exercice de son contrôle administratif ou intellectuel sur les documents d'archives » (définition associée à la norme ISAD/G). C'est par la médiation des instruments de recherche que les utilisateurs peuvent avoir accès aux archives conservées ; ils leur en font connaître la nature et, éventuellement, le contenu. Le travail de l'archiviste trouve donc sa finalité dans la réalisation et la large diffusion d'instruments de recherche qui doivent répondre le plus clairement possible à des demandes variées dans leurs origines comme dans leurs objets, tout en respectant et mettant en lumière la structure des fonds auxquels appartiennent les documents décrits.

Depuis le cartulaire, l'inventaire est né de l'impossibilité de transcrire, puis de publier, l'intégralité des documents conservés. Jusqu'aux années 1860, les principales tâches des archivistes consistaient dans les recherches pour le public et les expéditions d'actes administratifs[...]

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Écrit par

  • : conservatrice générale du patrimoine, professeure associée à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne

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