ARMES Armes lourdes
Les armes chimiques et biologiques
L' Allemagne lança le 22 avril 1915, près d'Ypres, la première attaque chimique massive ; elle fit environ dix mille morts ou hommes hors de combat. Il s'agissait de vapeur de chlore. La suite du conflit connut une « course » parallèle aux produits plus toxiques, mais aussi aux équipements protecteurs. Les effets létaux furent faibles : ainsi 1,1 p. 100 des pertes françaises seulement résultèrent des toxiques, mais les équipements protecteurs gênent considérablement le combattant. Le non-emploi de ces produits pendant la Seconde Guerre mondiale est mal expliqué ; plus exactement, les explications avancées sont vagues et contradictoires.
Pourtant, dès 1937, l'Allemagne, en cherchant des insecticides, avait découvert le premier organophosphoré, le tabun ; en 1939, le sarin ; en 1944, le soman. Après la guerre, les amitons furent mis au point. Ces neurotoxiques constituaient un « bond » dans la nocivité, et les trois derniers peuvent agir à travers l'épiderme. Leur existence n'a pas empêché, depuis et en plus, l'emploi de produits créés en 1915-1918, comme l' ypérite, dans des conflits « périphériques » malgré les très vertueuses dénégations des utilisateurs et de leurs « conseillers techniques ».
Traditionnellement, le classement de ces corps est triple :
– selon les effets physiologiques, ils sont suffocants, vésicants, toxiques du sang (dits aussi « généraux »), neurotoxiques ;
– selon la persistance au point d'épandage, ils sont fugaces, semi-fugaces, persistants ; mais certains produits normalement assez fugaces, en particulier par temps chaud et vent fort (sarin, soman), peuvent être « épaissis » ;
– selon la toxicité, qu'on mesure (unité : le Ct) par la concentration en milligrammes par mètre cube d'air qui, respiré une minute à cadence normale (hors efforts), produit sur n p. 100 des sujets un effet de létalité (L), ou d'incapacitance (I). On parlera donc, par exemple, du Ct 25 (p. 100) incapacitant de tel toxique, du Ct 100 (p. 100) létal de tel autre. À titre indicatif, les Ct 50 létaux – dont, concernant les survivants, le Ct incapacitant est de 100 – sont de l'ordre de 3 200 (mg/m3 d'air) pour le phosgène de 1914-1918 ; 70 pour le sarin (méthylfluorophosphonate d'isopropyle) ; 35 pour le soman (méthylfluorophosphonate de pinacolyle).
Si les formules sont bien connues, la production impose des règles de sécurité très strictes. D'où les « binaires » : sur trajectoire du « vecteur », le mélange de deux corps, peu dangereux lorsqu'ils sont séparés, donne un des neurotoxiques.
L'obus, avec ses épaisses parois et la charge explosive qui doit les rompre à l'impact, mais « brûle » une partie du produit, est un médiocre vecteur : le 155, à obus de 45 kg, ne disperse que 3 à 4 kg. Comme l'avait bien compris et appliqué l'armée soviétique, les roquettes et missiles ont un rendement très supérieur.
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Écrit par
- Alain BRU : ingénieur à l'École polytechnique, à l'École supérieure de gestion et à l'Institut national des sciences et techniques nucléaires (I.N.S.T.N.), général en deuxième section
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