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ARN (acide ribonucléique) ou RNA (ribonucleic acid)

Les traces fonctionnelles passées des acides ribonucléiques

Les coenzymes, vestiges d'un métabolisme passé ?

Le rôle des cofacteurs dans toutes les étapes du métabolisme cellulaire et leur distribution dans les trois domaines du vivant suggèrent la présence d'une grande variété de nucléotides dans l'ancêtre commun à toutes les formes de vie.

De nombreux auteurs ont souligné la présence possible des coenzymes avant l'apparition de l'appareil de traduction. Les protéines ne seraient apparues que secondairement, après les coenzymes et les ribozymes, considérés comme étant les traces fossiles des premiers catalyseurs. De fait, dans la cellule vivante contemporaine, seule une minorité d'enzymes protéiques fonctionnent sans coenzymes. Celles-ci sont, pour la plupart, des nucléotides (NAD, NADP, FAD, coenzyme A, ATP...), ou contiennent des bases azotées hétérocycliques dérivées de nucléotides (thiamine pyrophosphate, tétrahydrofolate, pyridoxal phosphate, etc.).

Les coenzymes seraient donc les vestiges d'enzymes nucléiques, catalyseurs qui ont précédé la synthèse protéique ribosomale, et les ARN de transfert seraient de grandes coenzymes responsables du transfert et de la liaison des acides aminés. Certains groupes catalytiques d'enzymes nucléiques ont pu être incorporés dans des acides aminés spécifiques comme ce fut peut-être le cas de l'imidazole constitutif de l'histidine, acide aminé dont la biosynthèse cellulaire actuelle est initiée par un nucléotide.

À l'appui de ce raisonnement, il faut ajouter les découvertes récentes du rôle catalytique des bases puriques (adénine et guanine) et l'existence d'une centaine de nucléosides modifiés dans la cellule vivante. Ces nucléosides auraient pu être présents sur la Terre primitive puisque leur distribution phylogénétique a été établie dans les ARN des trois domaines du vivant.

Mimer l'évolution darwinienne.

La survie d'une population, dans un environnement nouveau, est souvent liée à l'apparition de quelques variants auxquels une mutation aléatoire a conféré le pouvoir de s'adapter et d'exploiter avantageusement la nouvelle situation. Soutenues par ces observations, les méthodes combinatoires appliquées à l'échelle moléculaire sont devenues l'alternative expérimentale pour explorer l'évolution moléculaire darwinienne. La méthode, une sélection in vitro, n'exige aucune information concernant la séquence des molécules et mime des processus évolutifs à l'échelle moléculaire.

Sol Spiegelman, l'inventeur de la sélection non naturelle, a montré, dans les années 1960, que des populations d'ARN sont capables d'évolution lorsqu'elles se répliquent à l'aide d'une enzyme, la Qbêta réplicase. Une sélection de ce type aurait pu se produire au cours de l'évolution moléculaire précoce, il y a environ 3,8 milliards d'années, et nous pouvons aujourd'hui la reproduire en laboratoire...

Le comportement darwinien à l'échelle moléculaire nécessite la mise en évidence d'un processus de sélection (des ARN-aptamères), d'amplification des espèces sélectionnées, et de mutation, c'est-à-dire l'introduction de variants dans la population par le biais de mutations. À travers plusieurs cycles de sélection, d'amplification et de mutation, des populations de molécules sont « poussées » à évoluer vers des propriétés intéressantes. Les molécules présentant les meilleures « aptitudes » sont ainsi sélectionnées, une nouvelle génération prendra naissance. Les processus évolutifs menés expérimentalement permettent l'émergence de molécules qui n'ont pas encore été produites par la nature ou bien la résurgence de molécules précurseurs qui ont fortement divergé ou qui ont disparu naturellement.[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-VI-Pierre-et-Marie-Curie, Institut Jacques-Monod

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Médias

ARN de transfert : structure en feuille de trèfle - crédits : Encyclopædia Universalis France

ARN de transfert : structure en feuille de trèfle

ARN transfert-messager - crédits : Encyclopædia Universalis France

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