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SCHMIDT ARNO (1914-1979)

Arno Otto Schmidt (1914-1979) est né à Hambourg, d'une famille originaire de Silésie. Après des études secondaires, celui qui se présentera toujours comme un « autodidacte » entre en 1934 dans une entreprise de textile. Il commence à écrire ses premiers textes littéraires. Incorporé en 1942 au nord de la Norvège, sur une base de batteries côtières, il est ensuite envoyé dans la région d'Oldenbourg. Il se rend aux troupes anglaises en avril 1945 et décide, dès qu'il est libéré, de se consacrer entièrement à la littérature. D'abord installé en compagnie de son épouse dans un vieux moulin sur la lande de Lunebourg, et cloîtré, à partir de 1958, à Bargfeld, village près de Celle, en Basse-Saxe, il va survivre, pendant des années, grâce à des traductions de l'anglais et à l'amitié du romancier Alfred Andersch, qui lui commande des émissions radiophoniques.

Si l'œuvre d'Arno Schmidt est aujourd'hui reconnue, il ne faudrait pas oublier qu'elle est restée longtemps marginale, tant cet écrivain atypique passait pour scandaleux, ou illisible. Sans l'obstination d'une minorité d'enthousiastes, il n'aurait pas été sauvé de cette mise à l'écart.

Bon début, pourtant, que Léviathan ou le meilleur des mondes (1949). Ce roman lui vaut une récompense enviée, le prix de l'Académie de Mayence, qui lui est remis par Alfred Döblin. C'est là une des premières œuvres qui, en République fédérale, tente d'appréhender le traumatisme du nazisme et de la guerre dans les consciences. Dans le droit fil de Voltaire et de son Candide ou de l'optimisme, Arno Schmidt démystifie « l'esprit méchant » qui semble gouverner l'Univers : « Pour porter un jugement sur la nature du Démon en question, il nous faut regarder autour de nous et en nous-mêmes. »

En 1951, avec Brand's Haide, il approfondit cette thématique. Un soldat rentre en Allemagne après sa libération d'un camp de prisonniers. Arrivé dans un village, il est logé dans la maison de l'instituteur. La suite ? Une aventure amoureuse qui tourne court, et surtout un portrait au vitriol de la population environnante. Considérant que les Allemands ont tous été des suppôts du régime nazi, le narrateur les vilipende impitoyablement.

Troisième de ces « romans brefs » que Schmidt réunira par la suite sous le titre Les Enfants de Nobodaddy, Scènes de la vie d'un faune (1953) apparaît également comme une charge contre le comportement des Allemands sous le règne de Hitler. Düring, un fonctionnaire de sous-préfecture, père de famille d'une cinquantaine d'années, déverse sa bile sur la sottise et le fanatisme de ses concitoyens. En 1944, il échappe au bombardement des Alliés en se réfugiant dans une cabane avec sa toute jeune voisine, dont il s'est épris. Mais ce n'est pas n'importe quelle cabane : au xixe siècle, elle a servi de repaire à un déserteur de l'armée napoléonienne, dont Düring avait patiemment reconstitué le périple.

Trois ans plus tard, Cœur de pierre porte expressément en sous-titre « Roman historique de l'an de grâce 1954 ». Au-delà des aventures dans lesquelles se lance un géomètre, Walter Eggers, et qui s'achèvent classiquement par la découverte d'un trésor, ce qui transparaît, moins banalement, est un tableau des habitants de l'Allemagne de l'Ouest jetés dans le chaos de l'après-guerre, possédés d'une angoisse névrotique devant la menace de l'Est.

En 1956, on retrouve une semblable prédilection pour une actualité considérée sous un angle insolite dans La République des savants, roman d'anticipation à la Jules Verne, prétendument traduit de l'anglais. En 2008, un journaliste américain, Charles Henry Winer, arrière-arrière-petit-neveu d'un obscur écrivain, un certain Arno Schmidt, publie[...]

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