ARRANGEMENT, musique
L'arrangement et le respect de l'œuvre originale
On vient d'examiner les arrangements dans lesquels le but principal recherché était de reconstituer, de rendre vie à des œuvres qui, si tout arrangement était interdit, seraient condamnées à disparaître. Par comparaison avec les arts plastiques, nous pouvons dire que les cas que nous avons évoqués sont ceux de la restauration des œuvres dont l'existence est compromise par le temps. En continuant cette comparaison, nous allons maintenant étudier le cas de la reproduction, c'est-à-dire des diverses opérations effectuées sur une œuvre pour qu'elle devienne accessible par d'autres « moyens » que ceux prévus par l'auteur, mais avec le souci de respecter, autant que faire se peut, les intentions de cet auteur. De tels arrangements sont généralement des opérations de « réduction ». Il s'agit de transcrire pour un seul instrument, ou pour un groupe d'instruments numériquement faible, des œuvres écrites pour tout un orchestre. Ces opérations de réduction sont, encore de nos jours, une nécessité pratique pour toutes les œuvres dans lesquelles une musique d'orchestre joue un rôle d'accompagnement (opéras, concertos, ballets). La réduction pour un seul instrument à clavier (le piano dans l'énorme majorité des cas) est l'unique moyen qui permette à la fois aux solistes (chanteurs, instrumentistes ou danseurs) de répéter l'œuvre considérée sans avoir à faire appel à tout l'orchestre et, également, aux amateurs de pouvoir prendre connaissance de ladite œuvre. La plupart des opéras et des concertos sont ainsi publiés, pour le grand public aussi bien que pour les musiciens professionnels, sous la forme de réduction pour piano.
Mais, dans un ordre d'idées sensiblement différent, nous trouvons aussi des arrangements (qui sont également des réductions) effectués à partir d'œuvres dans lesquelles il n'existe pas de partie destinée à être « accompagnée ». L'âge d'or de cette sorte d'arrangements a été le xixe siècle et le début du xxe. On voit alors, non seulement de multiples réductions pour piano, mais aussi d'innombrables arrangements pour piano et violon, piano et violoncelle, trio, quatuor, etc., des symphonies classiques, poèmes symphoniques ou ouvertures d'opéras. De nos jours, cette pratique tend à disparaître pour des raisons beaucoup plus économiques que musicales. Mais à une époque où n'existaient pas encore les moyens de diffusion de la musique que nous connaissons, ces arrangements étaient indispensables aux amateurs qui n'avaient pas la chance d'habiter une ville où résidait un orchestre. Pour eux, la seule possibilité de prendre connaissance d'une vaste partie de la musique était de l'interpréter, seuls ou avec quelques amis, sous la forme d'arrangements divers. À partir du premier quart du xxe siècle, le disque et la radiodiffusion permirent à chacun de profiter, à un prix abordable, de n'importe quelle œuvre musicale. Il devait en résulter à la fois une diminution regrettable de la pratique de la musique de chambre par les non-professionnels et une quasi-disparition des arrangements qui n'avaient d'autre but que de transformer en musique de chambre la musique d'orchestre.
Il faut encore signaler que, parfois, des arrangements furent faits, sans aucune préoccupation économique, mais, semble-t-il, seulement avec l'intention de rendre exécutables, sous un habillement acoustique différent, des œuvres admirées. Il faut citer, à titre d'exemple, les transcriptions pour orgue des concerti grossi de Vivaldi faites par J.-S. Bach.
La préoccupation économique étant éliminée, nous pouvons donc aborder les arrangements qui, contrairement aux « réductions » dont nous venons de parler, sont en quelque sorte « extensifs[...]
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Écrit par
- Michel PHILIPPOT : professeur de composition au Conservatoire national supérieur de musique de Paris
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