Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

ANGLO-SAXON ART

L'art anglo-saxon de la période chrétienne

La christianisation de l'Angleterre barbare, dont la progression fut spectaculaire au viie siècle, ne provoqua pas de solution de continuité dans l'évolution de l'art anglo-saxon, mais au contraire le stimula et le diversifia. L'artisanat de la période païenne se poursuivit – la tombe de Sutton Hoo, postérieure de plusieurs décennies à la mission du moine Augustin, le prouve –, mais il devient de plus en plus difficile à suivre en raison de la disparition plus rapide que sur le continent de la coutume funéraire de l'inhumation habillée. En revanche, l'Église suscita des productions artistiques – objets liturgiques de métal, monuments sculptés et manuscrits enluminés – dont un certain nombre nous sont parvenues et constituent notre meilleure source documentaire pour la période qui va du viie au ixe siècle.

Les objets de métal

Qu'il s'agisse de bijoux ou d'objets liturgiques, les orfèvres anglo-saxons conservèrent à l'époque chrétienne les techniques et les styles acquis au cours de la période précédente : cloisonné (croix pectorale de saint Cuthbert, viie siècle, cathédrale de Durham), imitation de la taille biseautée et « Style II », celui-ci évoluant vers plus de réalisme (épingles de Witham, viiie s.). Vers la fin du viiie siècle, la taille biseautée fut remplacée par la ciselure ou la gravure de plaques d'argent, avec des motifs traités en aplats et parfois pointillés et des rehauts de nielle. La fibule de Strickland (du nom de son acquéreur, ixe s.) ou les appliques du trésor de Trewhiddle, en Cornouailles (enfoui vers 875), sont représentatives de ce nouveau style anglo-saxon, dit « Style de Trewhiddle ».

La réputation des orfèvres insulaires est alors telle qu'on fait appel à eux à Rome (schola Saxonum) pour fabriquer les ornements d'autel de Saint-Pierre. D'autres objets célèbres, comme le calice offert par le duc de Bavière Tassilon III (748-788) à l'abbaye de Kremmünster (conservé à l'abbaye, en Autriche), attestent leur influence directe, sinon leur travail. Parmi d'autres chefs-d'œuvre de l'orfèvrerie anglo-saxonne des viiie et ixe siècles, on ne peut manquer de citer les plus illustres : fibule d'argent gravé et niellé de Fuller (ixe s.), portant la représentation des cinq sens ; pommeau d'épée en argent doré et gravé de Fetter Lane, à Londres (ixe s.), avec des motifs serpentiformes en spirale ; enfin et surtout le « joyau d'Alfred » (Ashmolean Museum d'Oxford), découvert en 1693 dans le Somerset et attribué à ce roi (871-899) à cause de l'inscription † alfred mec heht gewyrcan (« Alfred a ordonné de me faire »). Cet objet en or, qui devait sommer un sceptre, offre sur une face protégée par un cristal de roche le portrait en émail cloisonné du roi tenant deux sceptres, et sur l'autre un élégant motif végétal gravé.

La sculpture

À la différence du monde celtique voisin, les Anglo-Saxons paraissent avoir ignoré la sculpture, jusqu'à ce que la multiplication des sanctuaires chrétiens en impose la nécessité. Comme sur le continent, malheureusement, peu de vestiges architecturaux des monuments primitifs, certains, révélés par des fouilles (Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Cantorbéry, consacré en 613 ; Saint-Wilfrid d'Hexam, en Northumberland, fondé vers 672-678), nous sont parvenus en raison des reconstructions successives de ces édifices. Des monuments sculptés annexes, en revanche, telles de grandes croix commémoratives de pierre, contribuent à combler ces lacunes documentaires. Les premiers témoins de la sculpture anglo-saxonne se rencontrent dès le viie siècle en Northumbrie, patrie des manuscrits enluminés, puis, dès la fin du viiie siècle, en Mercie et dans le sud de l'Angleterre, mais c'est seulement[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : directeur du musée des Antiquités nationales, Saint-Germain-en-Laye

Classification

Médias

400 à 500. Royaumes barbares - crédits : Encyclopædia Universalis France

400 à 500. Royaumes barbares

Grande-Bretagne, Angleterre anglo-saxonne, Ve-VIIe siècles - crédits : Encyclopædia Universalis France

Grande-Bretagne, Angleterre anglo-saxonne, Ve-VIIe siècles

<em>Évangiles d’Echternach</em>, v. 700 - crédits : BnF, cote cliché RC-B-12227

Évangiles d’Echternach, v. 700

Autres références

  • LES ROYAUMES ANGLO-SAXONS (exposition)

    • Écrit par
    • 1 097 mots
    • 1 média

    Anglo-Saxon Kingdoms: Art, Word, War (British Library, Londres, 19 octobre 2018 – 19 février 2019) réunit un ensemble exceptionnel de manuscrits, mais aussi de pièces d’orfèvrerie. L’exposition illustre les créations de la longue période commençant au ve siècle, avec l’installation...