ARCHAÏSANT ART, Grèce antique
Le terme d'art archaïsant, qui s'est imposé dans la critique de la sculpture antique à la suite des premières études détaillées de H. Bulle (« Archaisierende griechische Rundplastik », in Abhandlungen bayerischen Akademie, no 30, 1918) et de E. Schmidt (Archaistische Kunst in Griechenland und Rom, 1922), recouvre en français deux phénomènes voisins, mais distincts.
Dès la fin de la période archaïque proprement dite (vers ~ 480), on constate l'existence de tendances archaïsantes (en allemand : archaisierend ; en italien : arcaizzante), c'est-à-dire de traits archaïques isolés dans des œuvres d'un style plus « avancé ». Au ~ ve siècle, cette persistance peut être, comme chez Alcamène, collaborateur de Phidias au Parthénon, affaire de tempérament ou de commande (Hermès Propylaios et Hécate Epipyrgidia), ou bien, comme à Thasos, la marque d'un provincialisme qui s'attarde volontiers à des formules surannées (reliefs du Passage des Théores et stèle de Philis au musée du Louvre). Plus tard, à l'époque hellénistique (~ iiie-~ Ier s.) et sous le Haut-Empire (ier-iie s.), ces tendances illustrent les fluctuations de la mode en un temps où l'évolution créatrice continue qui avait caractérisé l'art grec depuis la période géométrique (~ xe-~ viiie s.) a cédé la place à un éclectisme qui puise son inspiration dans certaines phases marquantes de cette évolution : archaïsme attique de la seconde moitié du ~ vie siècle (Athéna d'Herculanum au Musée national de Naples) et style sévère (Athlète de Stéphanos à la villa Albani) plus particulièrement.
Le style archaïsant constitue en quelque sorte l'aboutissement de ces tendances : les œuvres qui en participent ne sont plus le résultat d'un amalgame de traits stylistiques disparates, mais le produit d'une volonté délibérée de revenir au style archaïque lui-même. Cependant il ne s'agit pas là d'une simple copie de modèles archaïques, mais de l'adaptation d'un style ancien à un goût nouveau, par un mouvement semblable à celui des nazaréens et des préraphaélites dans la peinture occidentale du xixe siècle : alors que la plastique grecque archaïque était essentiellement religieuse, les produits de l'art archaïsant sont, sauf quelques reliefs votifs, purement décoratifs. C'est pourquoi ce style se rencontre avant tout sur des reliefs, dont la plupart sont de facture attique : bases, autels, margelles de puits, grandes vasques de jardin, candélabres, entre autres.
De l'archaïsme, il ne conserve en effet que la manière : une calligraphie appliquée, parfois gracieuse, souvent sèche, toujours bien éloignée en tout cas de la vigueur des formes et surtout de la tension spirituelle qui le caractérisent. L'iconographie se limite à quelques thèmes qui se prêtent à ces effets : nymphes conduites par Pan ou Hermès, ménades et satyres, muses, grâces, personnifications diverses (Brises, Saisons...) ou, tout simplement, défilé de divinités ; toute une mythologie « galante » sans plus aucune signification religieuse. La prépondérance des figures féminines dans ces groupes autorise les effets de drapé empruntés aux korès ioniennes et attiques : raideur souvent arbitraire du plissé du chiton et plis en zigzag du manteau, tandis que la disposition paratactique des figures, qui ne composent presque jamais une scène cohérente, puisqu'elles ne sont fonction que de la surface à décorer, confère à ces représentations, même si attitudes et détails sont variés, un hiératisme qui peut passer pour archaïque.
La date de l'apparition du style archaïsant est controversée : pour G. Becatti (« Arcaistico, stile », in Enciclopedia dell' arte antica, vol. I, 1958), le goût ornemental pour la calligraphie archaïque n'apparaissait qu'au ~ [...]
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Écrit par
- Bernard HOLTZMANN : ancien membre de l'École française d'Athènes, professeur émérite d'archéologie grecque à l'université de Paris-X-Nanterre
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