- 1. Le style de cour français, son extension à l'Angleterre
- 2. Le style rayonnant
- 3. L'enluminure et son influence sur l'orfèvrerie
- 4. La Bohême
- 5. L'art de cour en France à la fin du XIVe siècle et les grands apanages
- 6. La sculpture : Beauneveu, son héritage
- 7. La peinture et l'apparition de l'italianisme dans les enluminures des frères de Limbourg
- 8. Bibliographie
ART DE COUR
La sculpture : Beauneveu, son héritage
La vis du Louvre, construite vers 1365 par Raymond du Temple, et son décor de statues de la famille royale et des frères de Charles V, qui accueillaient les visiteurs sur les degrés, ne sont plus connus que par la description d'Henri Sauval (Histoire de Paris, 1724), mais on peut les replacer dans le contexte de monuments analogues où le réel et le spectacle, l'acteur et l'art, se confondent dans le jeu représentatif : les huit statues du « beau pilier » au flanc nord-ouest de la cathédrale d'Amiens, qui font voisiner la Vierge et les saints avec Charles V et ses deux fils, son chambellan, son grand amiral et le cardinal Lagrange ; la cheminée du château de Poitiers, avec le duc de Berry et sa deuxième femme, Charles VI et Isabeau de Bavière (par Guy de Dammartin ?) ; Charles V et Jeanne de Bourbon au portail des Célestins de Paris (par Jean de Thoiry ?) ; Charles IV et l'impératrice se penchant vers les arrivants sur la plate-forme de la façade de Sainte-Marie de Mühlhausen en Thuringe ; et aussi, dès 1324, selon un texte formel, la reine Jeanne, épouse de Philippe V, et Mahaut d'Artois, agenouillées de part et d'autre du trumeau à Saint-Jacques-aux-Pèlerins. Ce dernier portail serait le prototype du portail commencé par Jean de Marville et sculpté par Claus Sluter à l'église de la Chartreuse de Champmol, fondation de Philippe le Hardi (1385). Sont à rapprocher du « beau pilier d'Amiens » les statues de Charles IV et de Blanche de Valois, à la tour sud de la cathédrale de Vienne, et celles des ducs d'Autriche et de leurs épouses sur la façade et aux portails latéraux. Les faiseurs de tombes occupant une place privilégiée dans la sculpture en relation avec les tombes royales de Saint-Denis, dont les auteurs sont connus – Pépin de Huy, Jean de Liège –, la question est de déceler si l'on peut retrouver leur manière dans la sculpture anonyme non funéraire, celle de Pépin de Huy au portail de Bethléem à Huy, celle de Jean de Liège dans des œuvres remarquables de même parenté stylistique (l'ange de l'Annonciation au Metropolitan Museum de New York, le saint Jean, digne d'un Donatello français, et le relief de la Présentation au temple au musée de Cluny) ou faut-il attribuer (ou rendre) ces œuvres à André Beauneveu ? La question reste posée.
Une place de premier plan doit être accordée à André Beauneveu, qui devint en 1386 le maître des œuvres « de taille et de peinture » de Jean de Berry. Il était natif du Hainaut et sculpta la Vierge d'albâtre de Notre-Dame de Courtrai ; puis il collabora avec Jean de Liège au tombeau de Philippe de Hainaut à Westminster et entra au service de l'évêque de Winchester, Guillaume de Wykeham. Pour Jean de Berry, il travailla avec Guy et Drouet de Dammartin au palais et à la Sainte Chapelle de Bourges et au château de Mehun-sur-Yèvre. De ses prophètes peints pour le Psautier du duc de Berry et pour les vitraux de la Sainte-Chapelle, de ses sculptures, se dégagent une certaine anxiété, un furor divinus, qui laissèrent leur marque sur l'œuvre de Sluter à Champmol. Philippe le Hardi dépêcha en effet Sluter à Mehun-sur-Yèvre, en 1391, pour étudier les travaux conduits sous la direction de Beauneveu. Au portail de Saint-Martin de Halle, les statues des rois mages sont, avant le portail de Champmol, libérées de la contrainte des piédroits, qui ne tendent plus derrière elles qu'un rideau architectural, et le plus vieux répond à la conception plastique de Beauneveu. Les deux autres rois montrent la greffe de l'idiome de cour parlerien sur le réalisme flamand, comme la tombe d'Adolphe Ier de Clèves et de Marguerite de Berg dans l'église de l'Assomption à Clèves. C'est l'influence de Beauneveu et du chantier du château de Vincennes qui s'est exercée sur la[...]
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Écrit par
- Philippe VERDIER
: professeur émérite, université de Montréal,
Kress Fellow , Galerie nationale, Washington, membre de la Société royale du Canada
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