GOTHIQUE ART
L'art flamboyant : 1350-1500
La réaction à cette tendance maniériste de l'art gothique devait être vive. Elle prend un caractère particulier en raison de sa liaison étroite avec le pouvoir politique. Celui-ci impose une nouvelle esthétique en faisant appel à une génération d'artistes tous très jeunes. Charles IV à Prague, Charles V à Paris, les papes à Avignon, les Visconti à Milan interviennent directement et définissent une finalité différente à l'activité artistique. À compter de cette époque, l'intervention du monde laïque va déterminer les axes de l'évolution des formes. Elles seront tributaires des commanditaires : au temps des souverains va succéder celui des princes et du style international ; puis la seconde moitié du xve siècle sera marquée par l'émergence de la bourgeoisie.
Le temps des rois (1350-1380)
L'activité artistique concerne dans chacune des capitales les différents domaines, avec une nette prédominance de l'architecture. À nouveau, c'est elle qui retient l'attention générale, qui va provoquer la réunion des artistes. En France, à partir d'une réflexion sur les monuments du xiiie siècle, on aboutit à une remise en cause des recherches sur la transparence et la lumière et à un retour à la muralité (château de Vincennes). À Prague, l'Empereur, qui avait opté dans un premier temps pour une conception française en faisant appel à Mathieu d'Arras, à Saint-Guy, y renonce, au profit d'une conception révolutionnaire. Peter Parler abandonne le principe de la travée pour une conception unitaire du volume, affirmée par le dessin du triforium et surtout par le mode de couvrement. Cette dominante monumentale marque l'ensemble de la production. Elle apparaît avec netteté dans le domaine de la sculpture qui accompagne à nouveau l'architecture. La conséquence en est une conception plastique qui rejoint celle du début du xiiie siècle mais qui demeure originale. Les sculpteurs abandonnent la formule éclatée de la première moitié du xive siècle dans le traitement des plis pour une vision plus synthétique. Les statues de Charles V et de Jeanne de Bourbon (Louvre) témoignent de ce profond changement par l'ampleur du drapé et la retenue des gestes. Ce changement touche également l'orfèvrerie, qui miniaturise des sculptures (sceptre de Charles V, Louvre), et la peinture. La peinture et l'enluminure rendent compte d'un sentiment nouveau de l'espace, qui se répète aussi bien à Prague ou à Avignon qu'à Paris. La tenture de L'Apocalypse d'Angers (avant 1380), dessinée par Jean de Bruges, fait apparaître une volonté de mise en perspective des scènes et un traitement monumental des corps.
Le style international
La décennie de 1380 marque une rupture entre les différentes techniques artistiques : la peinture connaît une évolution interne, suivant sa logique propre qui ne tient plus compte de l'architecture ni de la sculpture. La peinture de chevalet a conquis son autonomie. À certains moments, durant ce qu'il est convenu d'appeler le « gothique international », la sculpture cherche à s'en rapprocher.
L'architecture
Durant près d'un siècle, les architectes vont mener à son point ultime la conception élaborée précédemment. En France, l'évolution se fait en deux temps. Dans le premier, qui pourrait s'intituler l'âge des princes, se dressent des résidences somptueuses qui cherchent à rivaliser entre elles. Les châteaux des princes aux fleurs de lys se différencient par exemple par le traitement de leurs superstructures. En même temps, on assiste à un progrès des aménagements intérieurs déjà esquissés sous Charles V (escalier à vis en hors-d'œuvre, galeries, différenciation des espaces, circulation), sans oublier les décors souvent remarquables. Dans un second temps, qui correspond à la fin des[...]
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Écrit par
- Alain ERLANDE-BRANDENBURG : conservateur général honoraire du Patrimoine
Classification
Médias
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