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ART (notions de base)

Faire de soi une preuve d’art

La réflexion philosophique sur l’art de ces trois derniers siècles ne s’est-elle pas laissé exagérément obnubiler par l’œuvre, oubliant l’artiste créateur ? Au spectateur qui contemple l’œuvre, l’essentiel échappe peut-être, l’artiste se créant lui-même. L’un des plus beaux textes – l’aphorisme 548 d’Aurore. Pensées sur les préjugés moraux(1881) – de Friedrich Nietzsche (1844-1900) exprime cette conviction que l’art est d’abord une autocréation, qui aboutira chez le philosophe à l’hypothèse du Surhumain : « Ce qu’il y a de plus beau se passe peut-être encore dans l’obscurité… Je veux dire le spectacle de la force qu’un génie applique non à des œuvres, mais à lui-même en tant qu’œuvre… Le grand homme reste toujours invisible, comme un astre trop lointain… Sa victoire sur la force reste sans témoin. »

Doit-on aller jusqu’à supposer qu’au degré le plus élevé de la création, c’est-à-dire au degré d’une autocréation, l’œuvre deviendrait inutile ? Qu’à ce degré suprême l’artiste surhumain ne créerait plus d’œuvres du tout, ne créerait plus rien d’extérieur à lui-même ? Cette limite où le fou et le génie deviendraient indifférenciables, où le génie deviendrait autosuffisant au point de ne plus chercher à communiquer la moindre parcelle de lui-même, serait-elle l’avenir de l’art ?

— Philippe GRANAROLO

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Écrit par

  • : professeur agrégé de l'Université, docteur d'État ès lettres, professeur en classes préparatoires

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