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OTTONIEN ART

Enluminure

C'est avant tout l'enluminure qui assura à l'art ottonien sa place prédominante en Europe. Tandis que la peinture monumentale n'a été conservée que dans un petit nombre d'édifices – les fresques de Saint-Georges d'Oberzell à Reichenau sont les plus importantes –, de nombreux livres enluminés prouvent la richesse de chaque école. Parmi les plus grandes créations de l'art ottonien figurent de vastes cycles de scènes du Nouveau Testament qui décorent des évangiles, des évangéliaires, et aussi des sacramentaires. Ces cycles, influencés par l'art de la basse Antiquité, l'art carolingien et l'art byzantin, se suivent avec de nombreuses variations, et les écoles s'y distinguent nettement les unes des autres.

À partir du milieu du xe siècle environ, la Saxe prend une fois de plus une importance particulière. Autour des évangiles venant de Quedlinburg (ms. 755, Morgan Library, New York) naît à Corvey un groupe de manuscrits qui s'inspirent d'œuvres de la basse époque carolingienne et dont les formes se retrouvent jusque dans les livres exécutés par Bernward d'Hildesheim au début du xie siècle. C'est à la même époque qu'apparaît, dans l'île de Reichenau, l'école dont les débuts (groupes d'Anno et d'Eburnant) unissent des formes ornementales de la basse époque carolingienne, issues de Saint-Gall, à des modèles de l'«   école du palais » de Charlemagne (codex de Geron, cod. 1948, Landesbibliothek, Darmstadt). Lui succède une nouvelle phase désignée, d'après le nom d'un scribe (psautier d'Egbert, cod. 136, Museo archeologico, Cividale), « groupe de Ruodprecht », qui utilise parfois des modèles italiens et recherche des effets plastiques. Grâce au groupe qui prit le nom du scribe Liuthar (évangiles d'Otton III, cathédrale d'Aix-la-Chapelle), l'école de Reichenau trouve un style original qui demeurera vivace pendant des dizaines d'années. Les plus grandes réussites de cette école sont représentées par les codex somptueux (Clm. 4452, 4453, 4454, Munich et bibl. 22, 76, 140, Bamberg) créés pour Otton III et Henri II et dont les extraordinaires illustrations sont la marque d'un style qui a recours à la ligne pour réaliser des formes de plus en plus expressives. Dans les œuvres ultérieures de cette école, ce style reste encore vivant, apaisé et transformé. Les dernières s'abandonnent cependant entièrement à la raideur qui caractérise la fin de l'enluminure ottonienne.

Dans la production de l'école de Reichenau, le codex Egberti (cod. 24, Stadtbibliothek, Trèves), qui fut exécuté pour l'archevêque de Trèves, occupe une place privilégiée. À côté de peintres de Reichenau, on y reconnaît la main du «   Maître du Registrum Gregorii » de Trèves, ainsi nommé d'après le manuscrit que lui commanda l'archevêque et qu'il orna des portraits d'Otton II (musée Condé, Chantilly) et de saint Grégoire (Trèves). L'artiste a su, mieux qu'aucun autre peintre ottonien, adopter les moyens illusionnistes de l'art de la basse Antiquité et, en les associant à certains éléments carolingiens et même byzantins, il a créé un style original. Un sacramentaire exécuté pour le monastère de Lorsch (ms. 1447, musée Condé, Chantilly) fait de lui le maître de l'ornementation. L'une de ses œuvres, les évangiles de la Sainte-Chapelle (lat. 8851, Bibl. nat., Paris), inspira l'école d'Echternach ; les évangiles de Manchester (ms. 98, John, Rylands Library), œuvre plus tardive, influença celle de Cologne.

L'enluminure colonaise représente, en quelque sorte, le pôle opposé de l'école de Reichenau, car, ici, ce sont les moyens picturaux qui servent à créer des séries d'illustrations tout aussi expressives et originales. Il faut de[...]

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Saint-Michel, Hildesheim - crédits :  Bridgeman Images

Saint-Michel, Hildesheim

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