Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

RUPESTRE ART

Vers 9000 avant J.-C., après un très long épisode hyperaride, le Sahara est réoccupé par des groupes nomades de chasseurs-cueilleurs. Vers 5500 avant J.-C. commence l'Humide néolithique (5500-3000 av. J.-C. env.), qui voit l'essor de sociétés encore nomades mais maintenant pastorales. Elles possèdent, comme de nombreux groupes vivant actuellement dans la savane, de grands troupeaux de bœufs. Ce sont elles qui créent alors un art original, celui d'innombrables figurations dispersées de la mer Rouge à l'Atlantique : l'art rupestre saharien. Cet art ne forme nullement un bloc homogène. Il est constitué de nombreuses écoles territorialement limitées, diverses par le style, les techniques et les thèmes. Leur datation est difficile ; néanmoins, divers repères archéologiques, fauniques, climatologiques ou historiques permettent d'établir une chronologie approximative. On cherche, à travers l'éventail des écoles artistiques, à reconstituer la mosaïque culturelle et à approcher le système social et idéologique qui sous-tendait les cultures.

Ces écoles comportent soit des gravures, soit des peintures. Les gravures se rencontrent pratiquement dans toutes les zones à rochers. Les peintures, au contraire, n'étaient réalisées que dans certaines ethnies et sont concentrées en certaines régions : notamment le Tassili, le Hoggar, le Tibesti oriental, l'Ennedi et le massif d'Uweinat.

Trois écoles de peinture

Tassili n’Ajjer - crédits : D. Pichugin/ Shutterstock

Tassili n’Ajjer

C'est au Sahara central, et principalement au Tassili, que la séquence artistique est la plus complète et la plus riche. Les gravures les plus anciennes y sont celles du « Bubalin naturaliste » (école ainsi nommée parce qu'elle figure les derniers buffles géants). Contrairement à une assertion traditionnelle, cette école ne remonte pas à l'époque des derniers chasseurs, car elle inclut déjà des scènes pastorales, des bœufs montés ou harnachés, ou portant des objets divers, et même une scène de traite du lait. La faune de savane y abonde (grands buffles, éléphants, rhinocéros, hippopotames, girafes, antilopes, etc.). Les humains, peu représentés, sont de type europoïde. Contour et détails sont rendus surtout par des incisions au trait profond et soigneusement poli. Cette école, florissante au Tassili (oued Djerat) et au Fezzan (oued Mathendous), se rencontre aussi dans l'Atlas saharien.

Aussi anciennes que le Bubalin naturaliste, deux autres écoles de peintures se détachent vigoureusement au Tassili. La première, celle des Têtes rondes, compose des scènes à contenu manifestement symbolique, mystérieuses pour nous, et traitées dans des styles schématiques. Celui des « Martiens » est le plus connu : expressionniste, il figure surtout, par de simples contours au trait épais, des humains ou des « grands dieux » ; sur les visages, les organes des sens ne sont pas indiqués. La seconde école, de style très naturaliste, est celle du « Bovidien ancien ». Elle représente principalement des scènes pastorales ou des archers se livrant de pseudo-combats, vraisemblablement rituels. L'artiste utilise des aplats ocres, en représentant peu de détails. Les types humains sont ici nettement négroïdes.

Dans une phase plus récente, une école de gravures, l'école de Tazina, utilise encore le contour profond et poli, mais dans un style très schématique, élégant et fantaisiste. Par exemple, les pattes sont souvent terminées en longues pointes effilées. Cette école se rencontre surtout dans l'Atlas saharien, le Sud marocain et le Rio de Oro. L'oryx apparaît parmi la faune représentée, attestant l'aridification croissante.

Après un épisode sévère, l'Aride postnéolithique (env. 3000-1500 av. J.-C.), une dernière oscillation humide, vers 1000, voit s'épanouir au Tassili un groupe de peintures au naturalisme remarquable : l'école d'Iheren-Tahilahi. Des traits[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : ingénieur géologue à l'Institut géographique national, docteur en préhistoire, rédacteur en chef de la revue Sahara

Classification

Média

Tassili n’Ajjer - crédits : D. Pichugin/ Shutterstock

Tassili n’Ajjer

Autres références

  • ABORIGÈNES AUSTRALIENS

    • Écrit par
    • 7 150 mots
    • 5 médias
    Le principe de la vision par transparence des chamans se retrouve dans l'art rupestre des Aborigènes de la terre d'Arnhem, art dit « à rayon X » car il présente des animaux ou des êtres anthropomorphes dont le corps semble transparent, montrant l'intérieur, les os, les viscères, mais aussi de complexes...
  • AFRIQUE NOIRE (Arts) - Aires et styles

    • Écrit par , , , et
    • 15 151 mots
    • 2 médias
    Les peintures rupestres à destination religieuse (bami), associées aux masques et à la mort, sont exécutées par les vieillards dans les grottes réservées aux activités des masques. Elles sont généralement de couleur rouge, symbole du feu, du sang et de la mort. On y trouve de nombreuses représentations...
  • AJAṆṬĀ

    • Écrit par
    • 2 260 mots
    • 1 média

    Au centre de la chaîne des monts Indhyadri ou Ajaṇṭā (État du Maharashtra, district d'Aurangabad), le monastère d'Ajaṇṭā se compose d'une trentaine de cavernes creusées dans la roche volcanique d'un cirque au fond duquel coule un torrent. Comme tant d'autres, ces monuments rupestres, aménagés...

  • ALTAMIRA

    • Écrit par et
    • 612 mots
    • 2 médias

    La grotte d'Altamira, près de Santillana del Mar (Cantabrie), est la plus célèbre de toutes les grottes ornées d'Espagne : peu de grottes découvertes ultérieurement peuvent rivaliser avec ses peintures pariétales, chef-d'œuvre de l'art paléolithique.

    Cette caverne,...

  • Afficher les 48 références