- 1. Sacré-profane : une mise en perspective
- 2. Repères historiques
- 3. Un regard tourné vers le Moyen Âge
- 4. Maurice Denis et la théorisation de l'art religieux
- 5. Les principes esthétiques
- 6. Les femmes et l'art sacré
- 7. Quelques grands moments de l'entre-deux-guerres
- 8. Le tournant de 1945 et la « querelle de l'art sacré »
- 9. Visions nouvelles
- 10. Bibliographie
ART SACRÉ
Les principes esthétiques
Maurice Denis s'est fait théoricien face à la génération montante des artistes qui, après 1910, se réclamaient davantage du pouvoir de l'instinct. Une note inscrite dans son Journal en janvier 1909 montre son intérêt pour « des élèves, et qui vous écoutent, et qui tirent profit, non seulement des idées qu'on leur donne, mais des mots dont on se sert pour parler ». C'est ainsi qu'il a publié en cette même année 1909 une synthèse intitulée De Gauguin et de Van Gogh au classicisme, reprise dans Théories (1912) et dédiée À[ses]chers élèves de l'Académie Ranson, où l'on trouve exposés les éléments fondamentaux de sa pensée artistique, confirmés dans Le Symbolisme et l'art religieux moderne (1918, réédité dans Nouvelles Théories 1922).
En réaction à l'académisme du xixe siècle qui avait entretenu à tort la confusion entre l'objet créé par l'artiste et le spectacle de la nature, le symbolisme est défini comme « l'art de traduire et de provoquer des états d'âme au moyen des rapports de couleurs et de formes. Ces rapports, inventés ou empruntés à la nature, deviennent les signes ou symboles de ces états d'âme : ils ont le pouvoir de les suggérer. L'artiste doit chercher, selon le mot de Cézanne, non pas à reproduire la nature, mais à la représenter, par des équivalents, des équivalents plastiques. C'est le moyen d'expression (lignes, formes, volumes, couleurs), et non l'objet représenté, qui doit lui-même être expressif ». Pour Maurice Denis, cette définition de l'œuvre d'art pouvait, et même devait être mise au service de l'art chrétien, car elle conduisait à l'alliance entre la décoration et l'expression, entre l'« ornement et [la] poésie » et à « fuir le trompe-l'œil et le mensonge ». Ce qui est agréable à l'œil doit également nourrir l'esprit et, comme au Moyen Âge, doit enseigner, c'est-à-dire être édifiant ; or l'édification passe par le maintien du sujet en peinture – affirmation courageuse à une époque où la mode était au rejet du sujet par crainte du sentimentalisme. Mais, l'effort de sincérité demandé à l'artiste devait lui éviter de tomber dans l'imagerie « doucereuse » ou dans « la peinture d'histoire appliquée à la religion ». En conclusion, « l'artiste chrétien nous doit donner un art vivant, tiré de son propre fond, et parler le langage du cœur. Adopter une telle méthode, chercher les correspondances entre les signes plastiques et les modalités de sa propre sensibilité religieuse », voilà l'ascèse qui offrira un art chrétien pour notre temps. C'est ce qui est pratiqué aux Ateliers d'art sacré, où pour enrichir l'expérience de l'artiste, outre les cours dispensés sur le dogme, la théologie, la philosophie et bien sûr les différentes techniques, il est recommandé de « vivre une vie » empreinte de foi chrétienne.
Dans cette atmosphère se sont formés, en effet, des artistes dont les œuvres et la personnalité ont incontestablement marqué leur temps, à commencer par le père dominicain Marie-Alain Couturier, qui jouera un rôle majeur après la Seconde Guerre mondiale sans jamais renier sa formation initiale de peintre et de verrier.
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Écrit par
- Françoise PERROT : directeur de recherche au C.N.R.S.
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