ARTILLERIE (HISTOIRE DE L')
Naissance anarchique (1300-1450)
L' artillerie à feu va apparaître un peu partout dans le monde du xive siècle.
Après les scopetti(1303 ?) et les vaside 1331, les républiques italiennes se dotent de matériels moins primitifs. Venise les utilisera à la Chiozza (1378) pour y vaincre Gênes, sa rivale. En 1366, le pape avait une fonderie de canons à San Archangelo.
Les Maures abordent l'Espagne avec quelques pièces à feu qui sont présentes au siège d'Algésiras (1343).
En 1356, la première bombarde allemande est achetée en Flandre qui en fait commerce. Les voisins danois la connaissaient dès 1355. Grâce aux premières pièces turques, Amirath est victorieux des chrétiens à Kossova (1389). En cette même année, la première fonderie russe est créée par Dimitri Ivanovitch. Les Anglais utilisent une artillerie primitive contre les Écossais en 1338, mais déjà Édouard III disposait 400 de ces nouveaux matériels autour de Saint-Malo (1378). À Grünewald (1410), les chevaliers Teutoniques, en dépit de leur supériorité en artillerie, sont battus par les Polonais. En France aussi apparaissent les « pots de feu », par exemple dès 1339 les ribaudequins à feu roulant formés de plusieurs bouches tirant simultanément. L'emploi de quelques couleuvrines est signalé au siège de Puy-Guillaume (1339) et d'autres, montées sur pivot, ancêtres de l'artillerie navale, sont présentes à la bataille de l'Écluse en 1340.
Du Guesclin n'a que peu d'estime pour cette arme nouvelle, bien qu'il utilise contre les places fortes les grosses pièces. Il leur préfère les travaux de sape, à l'époque simple démolition mécanique sans utilisation d'explosif, dont l'usage courant ne se développera qu'au début du xvie siècle (1508 ?).
La création des pièces à feu, un peu partout et en même temps, autorise tous les pays à en revendiquer l'invention. Elle leur permet même de s'approprier un inventeur légendaire qui aurait fait sa découverte en 1340 : un certain Berthold Schwarz. Après avoir connu les prisons de Venise, condamné à mort par ordre de l'empereur Wenceslas, on le fit sauter, dit-on, avec un baril de poudre.
Il est donc difficile de fixer la date et le lieu exacts de la naissance de l'artillerie à feu. Cependant, compte tenu des luttes contre les préjugés religieux exploitant l'effet mystérieux de ces feux terrifiants, ainsi que de l'aveuglement des chevaliers qui s'exposaient devant les pièces pour en interdire l'emploi, c'est traditionnellement aux trois canons anglais de Crécy (26 août 1346) mettant à mal Génois et Français que l'on fait remonter le premier brevet de campagne de l'artillerie. Quelques rares auteurs le font remonter à la bataille de Poitiers – bien que celle-ci soit postérieure de dix ans – parce que l'arme nouvelle y fit preuve d'une plus grande efficacité.
Appuyée sur une fourche fichée en terre, la couleuvrine de Crécy exigeait plusieurs servants, dont un tireur qui l'épaulait. C'est elle qui ouvre la voie à toutes les armes à feu de campagne légères ou lourdes, mais surtout à l'artillerie. Les artisans de l'époque savaient, en effet, fabriquer à grande échelle, non encore à petite échelle.
Toutes les autres pièces sont sans affûts. Transportées par charrois, on les fixe pour le tir, soit en terre, soit dans de grandes caisses de bois armées de fer. Le tube est généralement tronconique pour admettre des boulets dont la fabrication n'assure pas des diamètres rigoureux. Le plus souvent, il est en fer forgé. Pour les plus petits calibres, ce sont des lames de fer enroulées en hélice et soudées à chaud, pour les plus gros des barres de fer soudées et cerclées. La chambre à poudre, du même diamètre que le fond du tube, est amovible pour rendre le chargement plus aisé et plus rapide. Un coin de bois[...]
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Écrit par
- M. SCHMAUTZ : colonel, ancien élève de l'École polytechnique, professeur à l'École supérieure de guerre
Classification
Médias