ARTILLERIE (HISTOIRE DE L')
Bombe, calibre, mobilité (1450-1730)
Après la totale anarchie des débuts, les siècles suivants vont s'efforcer de conduire rationnellement l'étude des perfectionnements techniques. Cependant, seuls les progrès dans la munition seront réguliers. Le projectile creux chargé de poudre, la bombe, augmentera en surface la trop faible efficacité linéaire du boulet plein. Pour le reste, une évolution hésitante marque la lutte permanente entre puissance et mobilité des matériels. De cette contradiction vont naître de grandes diversités de calibres, souvent empruntés par un pays à l'autre. Périodiquement, tel ou tel souverain tente, avec plus ou moins de bonheur, de les réglementer.
À partir de 1450, l'emploi de boulets de fer forgé ou d'airain devient courant. Bien que, dès 1500, le calibre soit exprimé par le poids des boulets, ceux-ci restent de forme irrégulière. Il faut attendre la fin du xve siècle pour obtenir des boulets de fonte et de fer plus homogènes et mieux calibrés. L'efficacité des pièces est encore augmentée, les pièces se chargeant à deux boulets. De même, pour mieux démâter les navires, on utilise les boulets ramés, ensemble de deux boulets reliés par une barre de fer de 50 centimètres à 1 mètre, ou les boulets enchaînés. Au xvie siècle, on tire à boulets rouges. Un tampon de foin, de chiffon ou de terre glaise, sec du côté de la charge propulsive, mouillé vers le boulet rougi au feu, isole la poudre et permet d'espérer que l'on pourra disposer d'un délai suffisant pour enflammer soi-même la charge.
Les premières bombes ont été réalisées dans les États allemands, mais c'est Jean Bureau, grand maître de l'artillerie de Charles VII, qui en perfectionnera la fabrication. Les premières seront utilisées en 1452 au siège de Bordeaux. Elles sont constituées par deux hémisphères de métal reliés après remplissage de poudre noire ; on les amorcera initialement avec une simple mèche de soufre et de salpêtre.
La bombe est introduite dans le tube à la main, mèche en avant. Puis le bombardier allume la mèche en enfonçant le bras dans le tube et, seulement après, enflamme la charge propulsive, d'où le nom de « tir à deux feux ». Lors du premier temps de cette manœuvre, la mèche pouvait être enfoncée dans la bombe ou bien allumée beaucoup trop près de celle-ci. Il n'y avait pas besoin de raté de charge pour obtenir des explosions prématurées ! La combustion étant fort inégale, la mèche pouvait s'éteindre sur la trajectoire. Si un bombardier craintif en plaçait une de trop grande longueur, il arrivait que l'ennemi la coupât avant l'explosion.
Aussi la plupart des pièces sont-elles mises hors d'usage par éclatement du tube. Un traité du canonnier du xve siècle recommandait au bombardier de craindre d'offenser Dieu plus que nul autre homme de guerre, car chaque fois qu'il fait jouer sa pièce, il est en danger d'être brûlé vif et de perdre la vie. C'est sans doute de cette époque que date la dévotion des artilleurs de tous pays à sainte Barbe. Par la suite, les perfectionnements de la bombe seront recherchés par une amélioration de l'amorçage. En 1566, les Allemands adoptent la forme d'un cylindre ouvert aux deux extrémités, l'un pour l'allumage, l'autre pour l'inflammation. Aucun réglage n'est encore possible et la chaleur de la combustion dans le cylindre provoque aussi des explosions prématurées. Inventée par les Hollandais et apportée en France par l'Anglais Malthus en 1674, la fusée est, dès la fin du xvie siècle, un cylindre de bois dont le canal axial est rempli de pulvérin. On perce l'orifice à la demande, avant de fixer l'ensemble sur la bombe avec de la colle et de la filasse.
Plus tard (fin du xviiie s.), on voit apparaître, aux côtés de la bombe, des munitions[...]
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Écrit par
- M. SCHMAUTZ : colonel, ancien élève de l'École polytechnique, professeur à l'École supérieure de guerre
Classification
Médias