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ARTS DE LA RUE

Festivals et fabriques

Festival d'Aurillac, 2007 - crédits : V. Muteau/ Troupe Warner&Consorten, 2007

Festival d'Aurillac, 2007

L'intégration des arts de la rue au paysage institutionnel résulte surtout des efforts des artistes. En fondant des festivals et des fabriques, ils ont pu séduire une partie de la critique et convaincre les tutelles d'apporter leur aide à une profession en pleine structuration. Le prix à payer est à l'aune de ces acquis : la subversion recule quand progressent les subventions. En 1983, Michel Crespin fonda Lieux publics à la Ferme du Buisson de Marne-la-Vallée, avec l'aide de la Direction du développement culturel (D.D.C.) du ministère de la Culture. Cet organisme de production convoqua des rencontres professionnelles, édita une revue, rassembla une documentation et publia un annuaire, le Goliath, en 1985. En parallèle, Michel Crespin faisait du festival Éclat d'Aurillac, lancé par ses soins en 1986 avec seulement six spectacles (plus un hors programme), l'un des principaux rendez-vous de la catégorie. Jean-Marie Songy lui succéda en 1994 à la direction artistique de cette manifestation, qui attire bon an mal an cent mille spectateurs venus applaudir une vingtaine d'équipes invitées et les centaines de compagnies « de passage » (plus de 300 en 1997, 459 en 2006 pour l'édition du vingtième anniversaire). Il prit également la responsabilité du festival de Châlons-en-Champagne (Furies), moins important toutefois que celui de Chalon-sur-Saône (Chalon dans la rue) dont le « in » accueille une quinzaine de troupes et le « off » environ 150, que Pierre Layac et Jacques Quentin ont animé de 1987 à 2005, date à laquelle la mairie en confia la direction à Pedro Garcia.

De tels succès ont sonné l'heure des décisions pour des pouvoirs publics qui s'étaient contentés jusque-là d'honorer quelques compagnies de subsides empruntés aux crédits du théâtre. La considération de l'État s'exprime d'une manière beaucoup plus timide qu'à l'égard des autres arts du spectacle, mais elle perdure d'un ministre à l'autre. En 1993, le ministère a créé l'association HorsLesMurs pour assumer les tâches d'information, de réflexion et de conseil. Sous tutelle de la Direction du théâtre et des spectacles (D.T.S.), elle devint en outre compétente pour les arts de la piste en 1996 et déménagea de Nanterre à Paris en 1998. Lieux publics, transféré à Marseille en 1989, porte depuis 1993 le titre de Centre national de création pour les arts de la rue. Le musicien Pierre Sauvageot en a pris la tête à la fin de 2000. Privilégiant ses missions de production et de diffusion, cet établissement participe depuis lors avec six autres entités à l'aménagement dans les anciennes huileries-savonneries L'Abeille d'une vaste Cité des arts de la rue comprenant des ateliers, des locaux d'administration, de formation et de médiation, réalisée par la municipalité avec le concours du département, de la région, de l'État et de l'Union européenne, dont l'ouverture s'annonçait proche en 2007.

Le système national bâti en plusieurs décennies pour le théâtre et dressé en quelques années pour la danse contemporaine ne s'adapte pas sans mal à la mobilité des arts de la rue, à la gratuité des spectacles, à la périodicité des productions, à la précarité des troupes, à l'inexpérience de la critique. Le recrutement d'un chargé de mission à la D.T.S., puis la mise en place d'une fugace « Mission pour les formes spécifiques et les esthétiques nouvelles » au sein d'une grande Direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles (D.M.D.T.S.), constituée en 1998 et refondue en 2006, et de nouveau le recours à des agents spécialisés pour traiter ces dossiers, trahissent autant de curiosité que de perplexité face à des arts inclassables. L'administration centrale verse une dotation à HorsLesMurs, accorde des aides à la résidence et à l'écriture,[...]

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Écrit par

  • : maître de conférences à l'université de Paris-X-Nanterre, chargé de cours à l'université de Louvain-la-Neuve (Belgique), membre du comité de rédaction des Temps modernes et d'Études théâtrales

Classification

Médias

Dario Fo - crédits : Mondadori Portfolio/ Archivio Pigi Cipelli /Pigi Cipelli/ AKG-images

Dario Fo

Festival d'Aurillac, 2007 - crédits : V. Muteau/ Troupe Warner&Consorten, 2007

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