FARHADI ASGHAR (1972- )

Fausses pistes et stratagèmes

Tourné en Espagne, EverybodyKnowsreprend l’allégorie de la disparition en l’étendant à un conflit d’envergure au sein d’une grande famille provinciale. Mais surtout, entre Le Passé et EverybodyKnows, le réalisateur a tourné Le Client (2016, oscar du meilleur film étranger) en Iran. Ce film marque l’entrée de son cinéma dans l’univers de la transgression. Les problèmes familiaux sont ici lestés de questions liées aux bonnes mœurs (Rana, l’épouse d’Emad est agressée dans son nouvel appartement, qui a appartenu à une prostituée, par un des anciens habitués qui ignore le départ de celle-ci), à la séquestration (EverybodyKnows) ou aux tentatives d’un prisonnier essayant de se racheter (Un héros).

Dans Un héros (grand prix au festival de Cannes 2021), tourné à Chiraz, l’auteur promeut une critique ouverte de la société. Cette fois, la justice ne se réduit plus à une cheville narrative comme dans Une séparation. Le spectateur emboîte le pas de Rahim durant une permission de deux jours hors de la prison où il purge une peine pour dette envers son beau-frère, Bahram. Au cours d’une permission, sa fiancée trouve dans la rue un sac rempli de pièces d’or. Après avoir hésité, Rahim décide de le confier à la police. La presse s’empare du sujet et fait de lui un héros local, puis une vedette médiatique, avant que le doute ne s’installe… A-t-il rendu l’argent ou a-t-il inventé toute cette histoire pour redorer son blason ? L’association qui avait fait une quête pour lui venir en aide la lui retire pour la donner à une femme dont le mari, condamné à mort, sera ainsi sauvé grâce au prix du sang. On est au sommet de l’instabilité.

Un héros – dont le sujet a été développé avec les étudiants de Farhadi à partir d’enquêtes sur des faits divers – amorce un tournant dans son œuvre. Il met ses thèmes et ses questionnements au service d’un litige qui heurte de front la société iranienne.