- 1. Les modes de notre connaissance
- 2. Les substructures
- 3. Les creusets géographiques
- 4. L'ossature de nos connaissances
- 5. Opacité des apparences et structures profondes
- 6. La maîtrise du milieu, base du pouvoir
- 7. La cité hydraulique
- 8. Les empires maritimes
- 9. Les empires des rizières
- 10. Permanence, récurrences et destins des pouvoirs
- 11. Bibliographie
ASIE DU SUD-EST (art et archéologie) Les grands empires
Les creusets géographiques
Non seulement des peuples divers se constituèrent très tôt en Asie du Sud-Est, mais ils se trouvèrent de plus implantés en des pays particuliers bien que tous fussent situés dans l'Asie des moussons. Il y eut, d'abord et nécessairement, dichotomie entre les destins insulaires et continentaux. On constate aussi que ce fut là – et là seulement – où s'offraient des espaces propres à la riziculture, et d'une ampleur suffisante, que des empires s'édifièrent. En Indonésie, seules la côte septentrionale de Sumatra et Java s'y prêtaient. En Indochine, ces foyers potentiels furent d'abord les deltas de la Salouen, du Mékong, du fleuve Rouge, parfois les plaines littorales du Centre Vietnam, par exemple, pour le Champa, et plus tard les grands bassins limoneux du Mékong et de l'Irrawaddy, accessoirement du Ménam. Bloqué vers l'intérieur par les montagnes, le Vietnam, à partir de son berceau deltaïque, devra descendre vers le sud au détriment du Champa. Encore, celui-ci absorbé, le verra-t-on se regonfler à la mesure du delta du Mékong, suivant une loi quasi immuable.
À la nécessité d'un espace suffisant on ajoutera – conséquence du climat – les besoins pour le mode de subsistance partout adopté : le riz. Pour produire les foules qui arment les empires, il faut certes des plaines, mais aussi arrosées par un fleuve puissant qui peut pallier la brièveté, ou l'insuffisance, des moussons. Java fait exception : elle le doit à la fertilité de son sol volcanique et à ses pluies équatoriales. Encore l'homme devra-t-il la remodeler entièrement, terrasse par terrasse, afin de créer la « plaine » rizicole nécessaire – tout comme il le fera au Japon. Enfin, l'Indochine est dessinée de telle sorte qu'elle ne s'ouvre réellement que sur la mer : l'histoire y viendra de la mer et remontera ses fleuves. Si, parfois, quelque courant descendra aussi du continent, il le fera au long de ses artères fluviales.
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Écrit par
- Bernard Philippe GROSLIER : directeur de recherche au C.N.R.S.
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