ASIE (Géographie humaine et régionale) Dynamiques régionales
Asie orientale
La partie orientale et nord-orientale de l'Asie est la plus difficile à identifier du continent eurasiatique. Le pays le plus vaste, le plus peuplé et le plus ancien de cet ensemble, la Chine, s'est toujours considéré au centre de l'écoumène, ni à l'est ni au nord-est de quelque chose, fût-ce un continent. En outre, pour ce « Pays du milieu » (Zhongguo), le nord-est de l'Asie désigne les provinces qui correspondent à l'ancienne Mandchourie. Ses voisins (Corée, Japon, Vietnam, Tibet, Mongolie) ont historiquement reconnu, à des degrés divers, la centralité chinoise et sa puissance. Ils ont tous intégré sa civilisation. Ils ont aussi revendiqué leur autonomie, face à la Chine et face aux colonisations occidentales, avec, dans les deux cas, un certain succès.
La Corée est traditionnellement nommée le « Pays de l'Orient » (en chinois Dongguo, en coréen Dongkuk) par les Chinois. Prise en tenaille entre les deux grands voisins chinois et japonais, ses monarchies ont versé le tribut à l'Empire chinois jusqu'à la fin du xixe siècle, puis le pays est colonisé par le Japon (1910, officiellement protectorat dès 1905) et accède à l'indépendance (1945) avant d'être séparée en deux États – communiste au nord, démocratique au sud – à l'issue d'une guerre (1950-1953) à la fois civile et internationale.
Le Japon, « Pays de l'origine du soleil » dont le nom traduit un compromis entre une situation périphérique, encore plus loin à l'est de la Corée, et l'affirmation d'un symbole autocentré, la source de Lumière, a historiquement évité toute invasion par la Chine, comme par l'Occident, excepté l'occupation américaine de 1945 à 1952. Mais il n'en a pas moins été imprégné de civilisation chinoise puis occidentale, sur fond de culture animiste (shintō) et bouddhiste. Se pensant désormais comme une sorte d'avant-garde de l'Occident, par sa modernité, son industrialisation, son avance technologique, son alliance avec les États-Unis, il pourrait tout aussi bien être qualifié d'Extrême-Occident que d'Extrême-Orient.
Quant à la Mongolie qui fut jadis au centre du plus grand empire que la Terre ait porté, étendu de la péninsule coréenne au Danube, elle est devenue une sorte de marge improbable de la mondialisation.
Dans cette partie de l'Asie se trouvent aussi les grandes puissances nucléaires, comme la Russie au nord, en Sibérie, ou les États-Unis à l'est, dans l'océan Pacifique. Leur antagonisme au cours de la dite guerre froide (1945-1989) marque encore la région avec les partitions coréenne et chinoise (république populaire de Chine et république de Chine, c'est-à-dire Taïwan).
Choisir une dénomination pour cette région, c'est donc déjà prendre parti. C'est avouer un positionnement géopolitique, à l'instar d'un Extrême-Orient identifié par certains observateurs européens tout au long du xxe siècle, ou bien d'une Asie du Nord-Est définie par le Pentagone à partir de 1945 pour la distinguer de l'Asie du Sud-Est. Une solution consiste à considérer le temps long de la civilisation sinisée, et à se projeter dans un futur relativement proche. C'est ce qu'a fait Léon Vandermeersh en évoquant le « nouveau monde sinisé » (1986). La référence à une culture ancestrale commune est à la fois séduisante car justifiée, et limitée car chacun des pays peut se targuer d'une originalité et même d'une modernité différente. Elle est également risquée, car le pari d'un réel rapprochement entre les différents pays et acteurs de la zone est loin d'être gagné. Si on peut la considérer comme la seule issue pacifique ou réaliste, les dirigeants actuels sont loin d'en être convaincus, et les peuples sont encore imprégnés de nationalisme. Or, sans eux, toute idée d'Union asiatique orientale n'est qu'une chimère.[...]
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Écrit par
- Manuelle FRANCK : professeur des Universités, Institut national des langues et civilisations orientales
- Bernard HOURCADE : directeur de recherche au CNRS
- Georges MUTIN : professeur honoraire de géographie, Institut d'études politiques de Lyon
- Philippe PELLETIER : professeur des Universités
- Jean-Luc RACINE : directeur de recherche au CNRS
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