AŚOKA ou AÇOKA (IIIe s. av. J.-C.)
La geste d'Aśoka
La geste d'Aśoka, où le merveilleux est souvent greffé sur des faits historiques, a inspiré la littérature et la sculpture narratives.
Selon les bas-reliefs du Gandhāra et du pays andhra qui illustrent les textes bouddhiques, sa naissance aurait été prophétisée par le Bouddha lui-même à son disciple Ānanda alors que, pénétrant dans la ville de Rājagriha pour y mendier leur nourriture, deux enfants sur leur passage interrompirent leurs jeux. Dans l'offrande d'une poignée de terre que l'un d'eux, Jaya, lui fit avec respect, le Bouddha vit la promesse des 84 000 stūpa qui lui seraient consacrés plus d'un siècle après par cet enfant renaissant sous les traits du grand roi Aśoka.
Cependant, dès cette naissance, son corps « rude au toucher » déplut si fort au roi Bindusāra, son père, que sa mère dut se sauver pour le cacher. Mais le devin Pingalavatsa avait confirmé sa destinée royale. Plus tard, il sera choisi pour aller réprimer la révolte du Panjāb. Disposant de moyens matériels très faibles, mais divinement secouru, il opère, par sa seule présence, la pacification. À la mort de son père, il s'élance du pays d'Avanti qu'il gouvernait vers Pāṭaliputra où les ministres le reconnaissent comme roi du Magadha. Son frère aîné, Susīma, revendique le pouvoir, mais, en tentant de forcer l'entrée de la ville, il tombe dans le piège qui lui est préparé et meurt consumé dans un brasier. Or, de ses seize femmes, le roi Bindusāra avait eu cent un fils, et la légende attribue à Aśoka l'extermination de tous ses autres frères, à l'exception de son cadet, Tissa. Et pour mieux justifier son titre de Candāśoka, « Aśoka le Cruel », il s'y ajouterait le meurtre de cinq cents ministres et de cinq cents concubines !
Alors, maître absolu du pouvoir, il choisit pour Premier ministre Radhagupta, réincarnation de l'enfant qui, se tenant près de Jaya lors du « don de la terre », avait été reconnu par le Bouddha comme le dépositaire de cette fonction future. Ainsi s'accomplissait la prophétie !
Et les sources bouddhiques poursuivent la chronique légendaire, multipliant l'énumération des prodiges entremêlés d'actes de violence. Le religieux Samudra parvenu à l'état de sainteté (arhat) devient en conséquence miraculeusement indifférent aux tortures que lui inflige le bourreau Girika dans la prison, reproduction des enfers bouddhiques, où il s'est par erreur introduit. Par lui, le roi Aśoka s'entendra révéler la prophétie mais en même temps reprocher sa cruauté. Alors il ordonnera d'anéantir la prison et le bourreau. Vient le récit du châtiment par le feu de la mauvaise reine Tiṣyarakṣitā qui, dépitée par le dédain que lui manifeste son beau-fils, lui avait fait arracher les yeux. Mais les vertus du prince Kunāla lui valent de recouvrer la vue !
C'est à l'épisode de l'érection des 84 000 stūpa, destinés à contenir dans de précieuses cassettes les reliques du Bouddha et les donations qui s'ensuivirent, que les sources bouddhiques se complaisent. Elles expriment le désir qu'éprouvait le saint roi de « transformer la terre en reliquaire ». Et, là encore, le miracle intervient. L'abbé du monastère royal de Kukkutārāma, en « cachant le soleil de sa main », indiqua le commencement des travaux. Alors, en une demi-nuit, s'élevèrent de terre des stūpa « d'une beauté surhumaine... destinés à marquer la présence des reliques corporelles » du Bouddha. « Le prince monta rapidement sur son char et, l'ayant chargé d'or, d'argent, de cuivre et d'ornements les plus divers, se rendit en un instant aux endroits où s'élevaient les reliquaires et leur offrit de multiples offrandes. »
Bien d'autres récits ont été recueillis dans l'Aśokavadāna[...]
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Écrit par
- Marie-Simone RENOU : membre de l'École française d'Extrême-Orient, diplômée de l'École pratique des hautes études
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