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AŚOKA ou AÇOKA (IIIe s. av. J.-C.)

Le texte des Édits

Le remords qu'il éprouva à la suite des atrocités commises lors de la conquête du Kalinga conduisit Aśoka à prononcer le vœu d'upāsaka : il devenait ainsi un « pieux laïc », mais ce n'est qu'un an et demi plus tard, après un pèlerinage à l'arbre de la Bodhi, où le Bouddha connut l'illumination, et une pérégrination rituelle de deux cent cinquante-six nuits, que son zèle s'affirma. C'est alors qu'il promulgua les quatorze Édits sur roc, suivis, une quinzaine d'années après, des sept Édits sur pilier. Influencé par l'Iran, il adopta le procédé des inscriptions qu'avait utilisé Darius pour la proclamation de sa propre gloire. Mais Aśoka ne veut atteindre que le triomphe de la Loi ( dharma). Sa doctrine s'exprime dans les Édits sous la forme « des grands principes de la loi naturelle : Éviter le péché, pratiquer la vertu et exercer les devoirs de la solidarité humaine. » « Avec une sorte de familiarité paternelle, (il) tient ses sujets au courant de ses progrès personnels, de ses réformes, de ses institutions. » Dans le premier Édit, il déclare qu'il est « défendu de sacrifier en tuant un vivant quelconque ». Et il ajoute : « Auparavant, dans la cuisine du roi ami des dieux au regard amical, chaque jour plusieurs centaines de milliers d'animaux étaient tués pour le repas ; mais maintenant, au moment où l'on grave ce texte de la Loi, on ne tue [pour le repas] que trois animaux : deux paons, une gazelle. Même ces trois animaux ne seront plus tués désormais. »

Dans les Édits suivants, il annonce l'institution de secours médicaux pour les hommes et pour les bêtes, la plantation des plantes médicinales, le forage des puits sur le bord des routes. Il insiste sur l'obéissance aux père et mère et aux maîtres, sur la courtoisie à l'égard des amis, sur la bonté envers les pauvres, les vieillards, les faibles, les esclaves et les domestiques, sur la libéralité à l'égard des brāhmanes et des samanes. Il annonce la création de « ministres » ou « surintendants » de la Loi qui seront les « agents de la propagande et les protecteurs des fidèles ». Il laisse aux condamnés à mort un délai de trois jours pour leur permettre de se préparer à la mort par des aumônes et des jeûnes, et pour donner à leurs proches le temps d'intervenir pour eux. Il substitue aux « tournées de plaisances » qu'accomplissaient les rois, lors des chasses et des divertissements, la « tournée de la Loi... : audience et distribution aux brāhmanes et samanes, audience et distribution d'or aux vieillards, audience, prédication de la Loi et questions sur la Loi aux gens des provinces ». Et il conclut : « Le plaisir accru qui en découle est, pour le roi ami des dieux au regard amical, un second revenu. » Il flétrit les nombreuses cérémonies engendrées par les motifs les plus futiles, exalte la cérémonie de la Loi. Et il n'hésite pas à faire sa propre confession publique : « Huit ans après son sacre, le roi ami des dieux au regard amical a conquis le Kalinga. Cent cinquante mille personnes ont été déportées ; cent mille ont été tuées ; plusieurs fois ce nombre ont péri. Ensuite, maintenant que le Kalinga est pris, ardents sont l'exercice de la Loi, l'amour de la Loi, l'enseignement de la Loi chez l'ami des dieux. Le regret tient l'ami des dieux depuis qu'il a conquis le Kalinga. En effet, la conquête d'un pays indépendant, c'est le meurtre, la mort ou la captivité pour les gens, pensée que ressent fortement l'ami des dieux, et qui lui pèse. »

Il invite ses sujets, et tout particulièrement ses fonctionnaires, à « combattre en eux la jalousie, l'irascibilité, la cruauté, la précipitation, l'obstination, la paresse et la lassitude ». Il promet le bonheur ici-bas[...]

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  • : membre de l'École française d'Extrême-Orient, diplômée de l'École pratique des hautes études

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