ASSEMBLÉE NATIONALE (France Ve République)
L’Assemblée nationale est l’une des deux chambres composant le Parlement français, sous la Ve République, l’autre étant le Sénat.
Cette dénomination provient du tout début de la Révolution française, lorsque les députés du tiers état, rejetant la division de la société en ordres, se déclarèrent « Assemblée nationale » par une délibération du 17 juin 1789 (après quelques hésitations quant à la qualification la plus adéquate). Sur le plan institutionnel, il s’agit là, sans doute, du premier acte révolutionnaire : l’Assemblée y affirme par là-même (telle est la signification du nom qu’elle vient de se donner) « il lui appartient et qu'il n'appartient qu'à elle d'interpréter et de présenter la volonté générale de la nation ».
En est-il de même aujourd’hui ? On peut évidemment en douter, au regard du rôle fort limité que jouent aujourd’hui les députés. De fait, l’un des grands objectifs des constituants de 1958 – réunis à l’initiative du général de Gaulle, alors chef du gouvernement – était précisément d’encadrer le pouvoir parlementaire en général, et en particulier celui de la chambre « basse ». Sous la IVe République, en effet, cette chambre basse (qui portait le même nom d’« Assemblée nationale ») avait, selon l’analyse des gaullistes, bénéficié d’une sorte d’omnipotence, se subordonnant excessivement le gouvernement et provoquant de trop fréquentes crises ministérielles. Celles-ci, toujours selon les gaullistes, avaient fini par faire perdre toute autorité à l’exécutif, le privant ainsi des moyens de gouverner efficacement la France. Le Parlement de la IVe République était certes bicaméral, mais l’autre chambre, le Conseil de la République, disposait de très peu de pouvoirs : cantonné à un rôle consultatif (il avait même été privé du droit d’initiative des lois jusqu’en 1954), il ne pouvait que retarder quelque peu l’adoption des lois par l’Assemblée nationale. Celle-ci exerçait donc seule la souveraineté nationale, comme l’indiquait l’article 3 de la Constitution.
Les constituants de 1958 souhaitent rompre avec cette organisation qu’ils jugent défectueuse. Pour cela, ils rétablissent un véritable bicamérisme, en dotant la seconde chambre (le Sénat) d’une autorité réelle, destinée à contrebalancer le pouvoir de l’Assemblée nationale. Le bicamérisme de la Ve République reste néanmoins relativement inégalitaire, dans la mesure où l’Assemblée nationale est élue au suffrage universel direct : non seulement elle seule a la capacité de renverser le gouvernement, mais elle dispose également du dernier mot en matière législative (art. 45, cf. infra). L’élection des 577 députés de l’Assemblée nationale pour cinq ans – ce nombre et cette durée ne sont pas fixés par le texte constitutionnel mais par une loi organique – constitue donc un moment démocratique important : dans le texte initial de la Constitution, il s’agit même de la seule autorité élue au suffrage universel direct – c’est seulement en 1962 qu’une réforme constitutionnelle de 1962 instaurera le suffrage universel direct pour l’élection présidentielle (la première de ce type se déroulera en 1965).
Malgré cette place éminente dans nos institutions, l’Assemblée nationale a rapidement renvoyé l’image d’une autorité déclassée, encadrée, voire soumise : la Constitution de 1958 s’est en effet employée à limiter fortement le pouvoir parlementaire, et les députés ont été les premières victimes de cette revalorisation de l’exécutif. La pratique a en outre accordé au président de la Ve République une telle place (politique, médiatique, institutionnelle) que toutes les autres institutions peuvent paraître bien pâles face à lui, au premier rang desquelles l’Assemblée nationale. Le taux de participation aux élections[...]
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Écrit par
- Arnaud LE PILLOUER : professeur de droit public à l'université Paris-Nanterre
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Médias