ASSISTANCE MÉDICALE À LA PROCRÉATION (AMP) ou PROCRÉATION MÉDICALEMENT ASSISTÉE (PMA)
Éthique et assistance médicale à la procréation
Sous cette appellation techniciste et froide se cachent deux sentiments fondamentaux de l’homme : l’espérance et l’inquiétude.
Pour les médecins chercheurs qui se sont engagés dans l’aventure des assistances médicales à la procréation, il s’agissait de traiter une situation pathologique, la stérilité du couple, et de soulager une souffrance. Face à l’ordre naturel défaillant, une solution audacieuse, la fécondation in vitro, a été envisagée il y a maintenant plus de trente ans, afin de franchir certains obstacles mécaniques empêchant la fécondation des gamètes. La réalisation de ce projet a nécessité la connaissance des mécanismes intimes des phénomènes en cause. Cependant, cette force qui pousse les chercheurs et les médecins à mieux comprendre les amène parfois sur des terrains inconnus ou plutôt hors de leur sphère de compétence, d’où a surgi l’inquiétude.
En développant l’insémination artificielle, le don de sperme, le don d’ovocytes, la congélation d’embryons, le diagnostic préimplantatoire, les médecins ont sans doute transgressé un ordre des choses qui paraissait naturel et qu’on ne devait qu’accepter. Ils ne voulaient que parler à certaines stérilités, ils en arrivent à interpeller la morale et le droit, voire certaines représentations de l’homme. Ils avaient sous-estimé ces évidences lorsqu’ils ont transformé les conditions de la reproduction, introduit une tierce personne dans le couple, ou figé la vie par le froid qui la place hors du temps. Ils allaient rendre ordinaires des situations naguère inimaginables, et bouleverser le contenu même de l’idée d’une filiation dite naturelle opposée à ces pratiques médicales. On conçoit bien les oppositions culturelles et religieuses que l'assistance médicale à la procréation peut susciter. C’est ce qui rend si importantes les positions du Comité national d’éthique.
En France, le Comité national d’éthique a traité, et continue de traiter certains aspects de ces A.M.P. et proposé plusieurs recommandations. Les lois de bioéthique de 1994, 2004 et 2011 ont fixé le cadre de l’exercice. De nombreux débats sont prévus afin d’être en phase avec les évolutions sociétales.
Le médecin doit se situer lui-même devant cette aventure ouverte et ses conséquences. Pour reprendre les paroles du Pr Jean Bernard : « Entre les Ponce Pilate de la science et les chercheurs désespérés, se dessine le troisième point, celui de la responsabilité, c’est-à-dire de la maîtrise de la reproduction humaine tant au niveau individuel que collectif. » L’éthique peut aujourd’hui donner un cadre serein à la réflexion sur le devenir de l’homme. C’est une démarche périlleuse, audacieuse, mais qui affronte les réalités de notre temps. Pour reprendre la proposition du Mouvement universel de la responsabilité scientifique que présidait le Pr Jean Dausset, il ne peut être question d’arrêter, voire ralentir cet élan vers la connaissance qui constitue l’honneur de l’homme. En conséquence, il ne saurait être question de limiter la recherche et l’avancée scientifique car toute connaissance est une libération de nombreuses servitudes, et c’est pour cela que le progrès existe bel et bien. Par contre, c’est sur l’utilisation des connaissances qu’il faut porter notre réflexion et notre attention, afin de toujours les restituer dans le respect du droit de l’être humain. Ainsi, la science s’appuie sur l’éthique afin de soutenir le temple de la raison. L’équilibre n’est pas encore parfaitement trouvé car c’est un domaine évolutif. L’important est que l’on veuille bien garder une sage témérité. C’est l’humanisme scientifique qui est à l’ordre du jour.
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Écrit par
- René FRYDMAN : professeur de médecine
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