ASSOCIATION LIBRE, psychanalyse
Expression utilisée en psychanalyse pour désigner l'objet de la règle fondamentale, laquelle consiste pour le patient à exprimer toutes les pensées (idées ; images ; Einfall, dit Freud, « ce qui tombe » dans l'esprit) sans discrimination aucune et de manière spontanée. L'école de Zurich et Jung utilisèrent des « mots inducteurs » (images, idées, nombres, etc.), qu'ils proposaient aux malades. Par une telle règle, on tend à éliminer les choix volontaires des pensées (c'est-à-dire la censure, dite seconde, entre le conscient et le préconscient) ; ainsi se révèlent des défenses inconscientes, soumises à la première censure, entre le préconscient et l'inconscient.
Dans la mesure où cette règle est en quelque sorte inapplicable dans toute sa rigueur (la pensée allant plus vite que sa traduction dans le langage, mais surtout en raison des réticences acceptées ou inconscientes), une orientation, un choix, si minimes soient-ils, se manifestent inéluctablement à travers les silences, les lacunes du discours, les lapsus, les coq-à-l'âne... Une chaîne signifiante se dévoile. Freud avait remarqué très tôt (L'Interprétation des rêves) que, « chaque fois qu'un élément psychique est lié à un autre par une association choquante ou superficielle, il y a entre les deux un lien naturel et profond soumis à la résistance de la censure » ; l'analyse montre que, « lorsque les représentations-but (Zielvorstellungen) conscientes sont abandonnées, ce sont des représentations-but cachées qui règnent sur le cours des représentations, et les associations superficielles ne font que se substituer, grâce au déplacement, aux associations réprimées profondes ». Freud ajoute qu'« il y a une autre représentation-but que le malade ne soupçonne pas : c'est la personne de son médecin ».
On est ainsi conduit à regarder la règle fondamentale non seulement comme une technique d'investigation de l'ensemble du psychisme, mais aussi comme ce qui structure la relation analytique (elle a pour pendant, du côté du psychanalyste, l'attention dite flottante, corrélative de la neutralité). Jacques Lacan, par exemple dans « La Direction de la cure et les principes de son pouvoir » (Écrits), a souligné que ce rapport entre analyste et analysé est un rapport de langage, où surgit dans le discours de ce dernier la dimension de la demande, qui est demande d'amour, impossible à satisfaire. Toute parole de l'analysé inclut, dans sa surdétermination, cette demande inconditionnelle. Aussi n'est-ce pas pour rien que l'analysé tolère très mal la liberté d'association qui lui est proposée.
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Écrit par
- Pierre-Paul LACAS : psychanalyste, membre de la Société de psychanalyse freudienne, musicologue, président de l'Association française de défense de l'orgue ancien
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